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Israël n’est plus confronté à une menace existentielle, contrairement aux Palestiniens

Israël propage le mensonge selon lequel il est assiégé par des gouvernements arabes voisins hystériques et antisémites

Tous les États-nations investissent massivement dans la manipulation, la persuasion et la propagande. Chacune de ces composantes est un pilier d’une gouvernance efficace ; pourtant, aucun pays n’a davantage réussi à convaincre le monde avec son discours compatissant que l’État d’apartheid d’Israël.

Depuis la création de l’État sioniste en 1948, la propagande pro-israélienne a convaincu l’Occident que cet État représente la seule démocratie au Moyen-Orient. Ce n’est pas le cas. Israël est une ethnocratie raciste avec des tendances théocratiques ; Israël a affirmé être le plus proche allié des États-Unis, alors qu’en réalité, la NSA a identifié Israël comme la menace numéro un pour les États-Unis en matière d’espionnage, sans parler du fait que le pays a attaqué un navire de la marine américaine et tué 34 marins américains, tout en parvenant à véhiculer le mythe selon lequel sa violence ne constitue que de la légitime défense.

Parmi les sujets de discussion développés par la hasbara (propagande israélienne), mon préféré est toutefois celui qui présente les Palestiniens comme des psychopathes qui se servent de boucliers humains, en dépit du fait qu’Amnesty International ne trouve aucune preuve d’une affirmation aussi odieuse, et malgré le fait que la propre Cour suprême d’Israël a conclu que l’armée israélienne avait utilisé des Palestiniens comme boucliers humains à plus de mille reprises au cours de la seule période allant de 2000 à 2005.

Il est inutile de trop gratter sous la surface pour décortiquer les peccadilles générées par la machine de propagande israélienne, mais la fête est bientôt finie. Un à un, les détracteurs des efforts systématiques déployés par Israël pour dissimuler et obscurcir l’occupation, la colonisation et le système d’apartheid ont levé le rideau et révélé le magicien qui se cache derrière.

Mais il subsiste un mensonge puissant et persistant. C’est ce mensonge qui a contribué plus que tout autre à protéger les violations par Israël du droit international et des droits de l’homme. Ce mensonge présente Israël comme un État assiégé en permanence par des gouvernements arabes voisins hystériques et antisémites.

Voyez-vous, si Israël est, comme il le prétend, confronté à une « menace existentielle » permanente, alors on ne peut que se montrer compatissant à l’égard des efforts fournis par ce pays pour faire ce qu’il faut afin de se défendre dans une telle crise. Je veux dire que l’orthodoxie politique veut que la sécurité l’emporte sur la politique, et que lorsque la menace pour la sécurité est existentielle, la sagesse conventionnelle stipule que les libertés civiles doivent être sacrifiées dans la quête de légitime défense.

Mais en dehors de la guerre de 1948, Israël n’a jamais été confronté à une menace existentielle représentée par ses voisins. Même lorsque des armées arabes ont semblé se mobiliser pour l’attaquer à la veille de la guerre de 1967, le président américain Johnson a demandé à la CIA une évaluation par le service de renseignement de ce à quoi ressemblerait une guerre probable entre Israël et une coalition arabe.

Selon l’évaluation, Israël pouvait « réussir à se défendre contre des attaques arabes simultanées sur tous les fronts […] ou à tenir sur trois fronts tout en parvenant à organiser une offensive majeure contre le quatrième ».

En bref, la puissance militaire combinée de l’ensemble du monde arabe en 1967 était tout autant une menace existentielle pour Israël qu’un bouton de fièvre, et c’est pour cela qu’Israël a bombardé préventivement l’Égypte le 5 juin 1967 – Israël ayant vaincu à peine six jours plus tard les armées combinées de la Syrie, de l’Irak, du Liban, de la Jordanie et de l’Égypte – comme l’avait plus ou moins prédit le président Johnson.

Depuis ce temps, les capacités militaires d’Israël ont connu une croissance exponentielle grâce au mécénat des États-Unis. La sécurité d’Israël n’a jamais été plus assurée. Israël possède des armes que les États-Unis refusent de vendre à tout autre pays de sorte qu’Israël maintienne toujours un avantage militaire sur tout ennemi ou toute association d’ennemis.

En dépit d’avantages aussi évidents et en dépit de cette suprématie régionale tant assurée, Israël perpétue l’idée qu’il est confronté à une menace existentielle représentée par ses voisins arabes, dont beaucoup sont soit en proie à des troubles politiques, soit rongés par une guerre civile sans fin prévisible.

Mais comme tous les autres sujets de discussion pro-israéliens, celui-ci se délite également devant le public mondial. Tout à coup, le monde arabe sunnite fait ami-ami avec l’État sioniste et l’État sioniste fait ami-ami avec le monde arabe sunnite. Les étranges compagnons font d’excellents amants, dois-je présumer.

« Il existe des preuves selon lesquelles les liens entre l’Arabie saoudite et les autres États arabes sunnites et Israël non seulement s’améliorent mais, après s’être développés en secret pendant de nombreuses années, pourraient également évoluer vers une alliance plus explicite en raison de leur méfiance réciproque vis-à-vis de l’Iran », observe le comité de rédaction du New York Times.

Le phénomène de « l’ennemi de mon ennemi est mon ami » laisse désormais Israël sans rival sunnite discernable. Adieu la menace existentielle ! Vous étiez une bonne amie d’Israël, un ennemi épouvantable du peuple palestinien, mais vous avez maintenant disparu.

« Mais qu’en est-il du Hezbollah ? », demande le troll sioniste bien trop prévisible. La milice chiite soutenue par l’Iran restera toujours une menace pour la sécurité d’Israël, mais elle n’a jamais représenté une menace existentielle et n’en représentera jamais une. En outre, le Hezbollah, après avoir combattu sans interruption en Syrie depuis plusieurs années, est au bord de l’épuisement.

Par ailleurs, le Premier ministre israélien Netanyahou a également rétabli les relations israéliennes avec la Turquie, tandis que le dictateur militaire égyptien Abdel Fattah al-Sissi a volontairement coopéré avec Israël non seulement pour écraser le Hamas, mais aussi pour étrangler l’économie palestinienne en coupant Gaza de l’Égypte.

Dans l’ensemble, la situation n’a jamais été aussi positive pour Israël et, dans le même temps, n’a jamais été aussi désastreuse pour le peuple palestinien. L’alliance naissante entre Israël et le monde arabe sunnite a laissé la question d’un État palestinien sans le moindre ami dans le monde.

En d’autres termes, Israël n’a jamais été plus assuré de sa sécurité, alors que les Palestiniens n’ont jamais été plus assurés des malheurs qui les attendent. Autrement dit, ce sont plus que jamais les Palestiniens qui font face à une crise existentielle réelle.

- CJ Werleman est l’auteur de Crucifying America (2013), God Hates You. Hate Him Back (2009) et Koran Curious (2011). Il est également l’animateur du podcast « Foreign Object ». Vous pouvez le suivre sur Twitter : @cjwerleman.

Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leur auteur et ne reflètent pas nécessairement la politique éditoriale de Middle East Eye.

Photo : le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Choukry rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou (AFP).

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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