Aller au contenu principal

Nos djihadistes et les leurs

Les dangers du terrorisme islamiste sont modestes aux États-Unis, surtout comparés à la version extrême droite de ce phénomène

Les réels dangers (armés) de la vie aux États-Unis

Considérez ce paragraphe comme une introduction au sujet du risque de se faire tuer aux États-Unis. Alors que j'écris cette dépêche, j'attends patiemment le prochain lot, déplorable, de massacres qui aura lieu dans ce pays. Et j'ai confiance. Avant que je ne termine d'écrire, un « loup solitaire » - ou un certain nombre de « loups solitaires » - américain(s) en colère (ou simplement perturbé(s) mentalement) et bien armé(s), vont tirer sur quelqu'un (ou sur plusieurs personnes) quelque part et éventuellement retourner l'arme contre eux-mêmes. Comptez-y. J'y consacrerai mon dernier paragraphe. Pensez à cela comme à quelque chose que vous seriez sombrement impatient de voir se produire, pendant que vous lirez ce texte traitant du désordre qui règne aux États-Unis à cause des armes. 

Les responsables de la sécurité et les politiciens des États-Unis ont martelé le message selon lequel la « plus grande menace » à la sécurité des citoyens américains serait un mouvement djihadiste extrême et brutal, opérant à plusieurs milliers de kilomètres, ainsi que les vidéos et les messages postés sur les médias sociaux par les followers du mouvement, qui le font paraître très proche. Gardant ceci à l'esprit, jetons un œil sur quelques-uns des dangers de la vie quotidienne aux États-Unis, où il est normal de posséder une arme. Voici donc une étude rapide de l'insécurité qui règne au niveau national, dans un pays armé jusqu'aux dents.

Je suis certain que vous ne serez pas surpris d'apprendre que, durant les six premiers mois de l'année 2015, une multitude d'incidents se sont produits, dont des conclusions peuvent être tirées. Il y a ce tueur toujours en cavale dans le nord du Colorado, qui a tiré sur des personnes qui se déplaçaient en voiture ou à vélo ou qui se promenaient tard dans la nuit. Il y a ce tueur en série présumé qui a jeté sept corps à l'arrière d'un centre commercial à New Britain, dans le Connecticut, et qui pourrait à présent être emprisonné pour des accusations complètement différentes. Il y a ce procès en cours de James Holmes qui a tué douze spectateurs et en a blessé soixante-dix autres dans un multiplexe à Aurora, dans le Colorado, en 2012. Il y a ce meurtre collectif de sept personnes perpétré en février dernier dans la toute petite ville de Tyrone, dans l'État du Missouri, par Joseph Aldridge, un homme reclus et armé, qui s'est ensuite suicidé. Et n'oubliez pas Sudheer Khamitkar, qui a abattu sa femme et ses deux jeunes fils et s'est ensuite donné la mort à Tulsa, en avril, ou Christopher Carrillo, qui a assassiné quatre membres de sa famille avant de retourner son arme contre lui à son domicile à Tucson, en mai. Ainsi que de nombreux autre cas similaires.

Il devrait y avoir, dans une telle liste, une catégorie spécifique pour un phénomène qui, bien que n'ayant, en grande partie, pas fait l'objet de statistiques, a progressivement attiré l'attention ces dernières années, à mesure que de plus en plus d'Américains portent des armes dans de plus en plus d'endroits différents. Ce qui signifie que de plus en plus d'armes à feu sont lâchées dans la nature. Je parle ici du carnage provoqué par de tout petits enfants (ou peut-être devraient-ils être considérés comme des loups solitaires miniatures américains). Les exemples de coups de feu tirés par des enfants en bas âge vont de l'enfant de deux ans qui a tué sa mère dans un supermarché, dans l'État de l'Idaho, avec l'arme qu'elle était en train de ranger dans son sac à main, fin 2014, à l'enfant de trois ans qui, ayant  découvert une arme dans un sac à main, dans une chambre de motel à Albuquerque en février dernier, avait blessé son père et sa mère enceinte en un seul tir. Cette liste, pour cette année, devrait aussi inclure l'enfant âgé de deux ans, en Floride, qui a trouvé l'arme de son père dans la voiture familiale et s'est tué avec celle-ci en janvier dernier, l'enfant de trois ans qui a ramassé une arme laissée sans surveillance et qui a tué un bébé d'un an dans une maison à Cleveland, en avril dernier, l'enfant de deux ans, de Virginie, qui a trouvé une arme en haut d'une commode et s'est tué à la fin du mois de mai, et l'enfant de quatre ans qui, à peu près au même moment, a ramassé un fusil de chasse à un stand de tir de Sioux Falls, dans le Dakota du Sud, et a tué son oncle âgé de 22 ans. Aux États-Unis, le nombre des meurtres commis par des enfants en bas âge a été suffisamment important, durant ces années où l'utilisation des armes s'est généralisée, pour distancer significativement le nombre de meurtres constituant des actes de terrorisme.

Une surenchère de violence

Pendant que nous y sommes (avant d'aborder le vrai sujet qui nous importe ici), il existe un ensemble de personnes qui constituent ce que j'appelle les meurtriers du suicide. Ils n'ont pas d'idéologie politique ou religieuse, comme ceux du Moyen-Orient qui commettent des attentats-suicides, mais ils sont engagés dans une mission dont la fin escomptée est le suicide ainsi que l'assassinat d'une ou de plusieurs personnes. Considérez-les comme des djihadistes américains « officieux », qui n'ont aucun contact avec l'État islamique (EI) par le biais des médias sociaux, qui ne regardent pas de vidéos incendiaires relatant des actes de terrorisme, mais qui sont quand-même énervés, souvent profondément perturbés, armés et qui se lancent dans des missions suicides dans leur pays, les États-Unis.

Je veux parler d'une forme de meurtre extrêmement répandue que, pour autant que je sache, personne n'a pris le temps d'archiver et de traduire en termes de chiffres : les hommes qui tuent leur petite amie ou leur femme (et parfois d'autres personnes se trouvant à proximité) puis se suicident. Voici une liste aléatoire de certains des cas signalés et sur lesquels je suis tombé par hasard en 2015 : en janvier dernier, dans la ville de Nutley, dans le New Jersey, qui porte bien son nom (Nutley est proche, en sonorité, de « nutty », qui signifie « dingue, timbré, barjot », NdT), un homme de 38 ans a tiré sur sa petite amie de 37 ans puis s'est suicidé ; en janvier dernier, à Lincoln, dans le Nebraska, un homme de 49 ans a tiré sur sa petite amie de 44 ans, a appelé la police pour signaler le meurtre, puis s'est suicidé ; toujours en janvier dernier, un homme de 29 ans a tiré six ou sept fois sur sa petite amie de 27 ans, enceinte, dans un hôtel pour les sans-abris dans le quartier de Times Square à New York, avant de se donner la mort ; en février dernier, à Wading River, New York, un homme de 44 ans a abattu sa petite amie de 43 ans et la fille de 17 ans de cette dernière, avant de se donner la mort ; en mars dernier, à Chicago, un homme de 23 ans a abattu sa petite amie de 24 ans, puis s'est suicidé, l'arme pointée dans sa bouche ; en avril dernier, un homme de 48 ans, de la ville de Fort Worth, qui avait un billet de loterie gagnant de 500 $ et refusait de partager les gains avec sa petite amie de 46 ans, a tiré sur cette dernière et a retourné son arme contre lui après leur dispute, puis a appelé la police pour signaler le crime avant de mourir ; en avril dernier, dans la ville de Cleveland, un homme de 48 ans a abattu sa petite amie de 19 ans puis a réitéré cet acte, à deux pas de là, assassinant son ex-femme de 47 ans, avant de retourner son arme contre lui ; toujours en avril dernier, dans la ville de Montgomery, dans l’État de l'Alabama, un homme a abattu sa petite amie, puis s'est ensuite donné la mort ; de même, en avril dernier, un médecin de 35 ans a abattu sa petite amie de 39 ans à Fayetteville, Caroline du Nord, puis un médecin de 32 ans, dans le New Jersey, avant de se suicider quand la police s'est approchée de lui ; en mai dernier, à San Diego, un homme de 52 ans a abattu sa petite amie de 28 ans et la mère de 63 ans de cette dernière avant de se suicider. Début juin, à Cleveland, un homme de 30 ans a abattu son ex-petite amie de 24 ans et le grand-père de cette dernière, blessant grièvement sa grand-mère, puis s'est suicidé. Et ainsi de suite : voyez-vous, ce n'est qu'une liste non-exhaustive des actes de ce type, qui semblent être remarquablement banals.

Passons maintenant à des faits plus importants. Je veux parler d'une catégorie de meurtre qui a fait beaucoup parler d'elle dans les médias récemment : les tirs de policiers. Les statistiques traditionnellement établies par le FBI concernant ce type de meurtre se sont révélées être bien en dessous de la réalité ; d'autres personnes se sont donc emparées du phénomène. Le journal Washington Post, par exemple, a commencé récemment à tenir une base de données recensant « chacun des tirs fatals de la police » ayant eu lieu aux États-Unis en 2015 (décès liés au Taser non inclus). Les chiffres s'élèvent jusqu'à présent à au moins 385 décès pour les cinq premiers mois de 2015, ce qui représente jusqu'ici, pour cette année, environ 1 décès provoqué par une arme à feu (suicides non inclus) sur 13.

« Environ la moitié des victimes », rapporte le journal, « étaient blanches, et l'autre moitié était issue des minorités ethniques ». Mais les statistiques démographiques étaient radicalement différentes en ce qui concerne les victimes non armées, dont les deux tiers étaient noires ou hispaniques. « Globalement, les noirs ont été tués trois fois plus que les blancs ou les autres minorités, lorsqu'on ajuste les statistiques à la population du secteur de recensement où les tirs ont eu lieu. »  Une étude publiée par le quotidien The Guardian ajoute ce détail : « Les Américains noirs sont deux fois plus susceptibles de ne pas porter d'arme sur eux lorsqu'ils sont tués lors d'une rencontre avec la police que les personnes blanches ».

D'après The Guardian, un rapport rédigé récemment par le Bureau fédéral des statistiques judiciaires établit que, ces huit dernières années, en moyenne 928 Américains sont morts chaque année des mains de la police. (D'après les chiffres du FBI : seulement 383.) En d'autres termes, ces huit dernières années, 7 427 personnes ont été tuées par la police, l'équivalent de deux fois les attentats du 11 septembre. Comparé aux autres pays développés, ces résultats sont sidérants. Il y a eu, par exemple, plus de tirs de police fatals aux États-Unis pendant le mois de mars 2015 (97 décès) qu'en Australie entre 1992 et 2011 (94 décès). De même, le nombre de tirs de police a été trois fois plus important, rien qu'en Californie, en 2015 (72 au total), que le nombre de tirs de police recensés chaque année au Canada (25 au total).

Quant aux dangers de l'utilisation des armes, dans un pays où l'on recense entre 270 et 310 millions d'armes, soit, en moyenne, presque une arme à feu pour chaque homme, femme et enfant, nous n'avons pas encore abordé les catégories les plus importantes de décès qu'elles ont provoqués. Prenez, par exemple, le suicide par arme à feu. En ce qui concerne la dernière année pour laquelle nous disposons de statistiques, 2013, on a recensé 21 175 décès de ce type et ils semblent être en augmentation. Le nombre de décès par arme à feu dans ce pays s'élevait à 33 636 cette année-là, et ce chiffre semble lui aussi être à la hausse.

Et, pendant que nous y sommes, nous devrions peut-être aborder un autre type d'arme (même si celui-ci n'a, généralement, pas la même finalité que les armes à feu) : les voitures, camions et autres véhicules. De nombreux décès dus à des accidents de la circulation pourraient certainement être qualifiés d'assauts, quoi que non intentionnels, impliquant une arme mortelle.  En 2013, 32 719 décès de ce type ont été recensés, égalant le nombre de décès par arme à feu recensés aux États-Unis.

En tout, nous parlons donc d'environ 66 000 assauts ayant entraîné la mort et impliquant des armes ou des véhicules dans ce pays, chaque année.

Les dangers de l'utilisation des armes et l’alimentation de l'« État de la sécurité nationale »

À présent, laissons derrière nous ces scènes de carnage et passons à la « plus grande menace » du moment - du moins, d'après ce que les responsables de l'État de la sécurité nationale voudraient nous faire croire. Vous savez de quoi il s'agit, bien sûr : l'État islamique et ses compétences sophistiquées en matière de propagande qui, selon Washington, a régulièrement le dernier mot, quelles que soient les réponses apportées par ce pays et ses alliés en réponse à cette propagande. Malgré des dépenses de près de mille milliards de dollars engagées chaque année pour assurer la sécurité nationale, la surveillance élaborée et les systèmes de contrôle qui ont été mis en place, nous restons étrangement sans défense face aux stratagèmes du groupe. Par le biais des médias sociaux, ses facilitateurs menacent d'effacer la distance, de traverser les océans pour atteindre de jeunes musulmans américains déracinés, marginalisés et souvent légèrement déséquilibrés, d'attiser leur colère et - du moins selon ce qu’on nous raconte - de préparer le terrain pour semer un désordre sans précédent dans leur « propre pays ».

Avec ce scénario désespéré en tête, voici ce que représente l'année 2015 en termes de morts et de destruction  provoquées par le terrorisme induit par l'État islamique aux Etats-Unis : en mai, de toute évidence affectés par la présence de l'EI sur les médias sociaux, Elton Simpson et Nadir Soofi, deux jeunes musulmans américains de la ville de Phoenix qui vivaient en colocation, ont pris la route pour attaquer une exposition et un concours de caricatures du prophète Mohammed qui se tenaient à Garland, dans le Texas, et qui étaient organisés par une islamophobe du nom de Pam Geller. Armés de fusils d'assaut et portant un gilet pare-balles, ils ont réussi à blesser à la cheville un garde de sécurité non armé avant d'être tués par un agent de la circulation au repos, qui était aussi chargé de la surveillance de l'événement.

De même, ce mois-ci, un musulman noir âgé de 26 ans, Usaamah Rahim, aurait été, selon les dires, impliqué dans un complot inspiré de l'État islamique pour décapiter Geller à Boston. Il aurait ensuite, soi-disant, abandonné ce plan, décidant à la place de décapiter quelques « hommes en bleu » (policiers) locaux.  Accosté dans la rue par la police de Boston et des agents du FBI habillés en civils pour un interrogatoire, il aurait soi-disant sorti un « couteau de style militaire » et les aurait menacés de mort. Il a alors été tué par balle. (Certains détails de leur explication ont été remis en question.) Et c'est tout. La plus grande menace de la planète a réussi, jusqu'à présent, cette année, à inspirer trois jeunes hommes marginaux qui se sont ensuite fait tuer. Quant à ses dangers pour la vie quotidienne aux États-Unis, remettez cela dans le contexte des dizaines de milliers de décès par arme à feu recensés chaque année, ou même des meurtres perpétrés par les tout petits enfants.

Alors que tant de discussions ont été menées à propos des éventuels complots djihadistes, voilà la preuve dont nous disposons quant à la menace que représente l'État islamique dans « notre pays » pour le moment et d'après laquelle tant d'argent est dépensé et tant d'efforts de prévention sont déployés (sans parler de tout le reste). C'est, selon ce qu'on nous dit, une « nouvelle menace » complètement différente des dangers normaux de notre société américaine. En fait, une telle violence, aussi rare qu'elle puisse être, ne devrait pas sembler absurde du tout. Elle devrait nous toucher de la même manière, même si les noms des coupables ont parfois une résonance différente : ce sont des hommes, souvent jeunes, ayant accès à des armes, dans certains cas perturbés mentalement, nourrissant une certaine rancune et ayant l'intention d'en découdre. Ils devraient nous rappeler ces hommes américains qui tuent leur petite amie si régulièrement et ensuite se suicident ou tous ces tueurs de masse ayant sévi ces dernières années.

Pourtant, c'est le seul danger sur lequel on attire constamment l'attention, prétendant que c'est le seul qui mérite à la fois qu'on le craigne et qu'on y investisse. Bien sûr, le terrorisme djihadiste est parfaitement réel ; si les Américains vivaient en Syrie, en Irak ou en Libye, ce serait un problème terrifiant. Mais, quelles que soient les compétences actuelles des propagandistes de l'EI, une telle violence s'est certes révélée, depuis les attentats du 11 septembre, être plus dangereuse que les attaques de requins aux États-Unis, mais guère plus. Et quand les administrations répressives sont interrogées à ce sujet, leur réponse est, selon Charles Kurzman et David Schanzer, qu'elles aussi considèrent les dangers du terrorisme islamiste comme étant effectivement modestes en Amérique, surtout en comparaison avec la version du terrorisme issue de l'extrême droite dans ce pays.

Le fait que nous soyons toujours protégés par deux océans et que les pays représentant le berceau du djihadisme islamique soient effectivement éloignés, est à prendre en compte. Mais soyons honnêtes : la menace du terrorisme islamique aux États-Unis alimente aussi l'« État de la sécurité nationale ». (D'où tous ces complots, qui s'avèrent être essentiellement initiés, financés, souvent organisés par les informateurs du FBI, puis « déjoués » par ce dernier.) C'est un des moyens les plus répandus, pour les représentants de cet État-dans-l’-État, d'en assurer le soutien et le financement, de se doter de privilèges spéciaux, dont le fait de ne jamais avoir à comparaître devant un tribunal pour de potentiels actes criminels, et d'implanter fermement leurs méthodes anti-démocratiques ainsi que le principe de la couverture du secret aux États-Unis.

Quant aux réels dangers de l'utilisation des armes dans notre société, il n'existe probablement aucune personne qui serait prête à investir beaucoup d'argent pour vous en protéger et, malgré ces 66 000 décès recensés chaque année, d'une certaine manière, le monde continue de tourner et ce n'est pas demain qu'il cessera de le faire.

Au fait, une dernière chose vous attend, n'est-ce pas ? Je vous ai promis un dernier paragraphe. C'est parti.

Dans la semaine – et depuis que j'ai commencé à écrire ce texte – une attaque « inspirée » de l'État islamique a en effet eu lieu aux États-Unis. Un homme de 21 ans s'est jeté sur un agent du FBI qui fouillait son domicile dans le quartier de Staten Island, à New York, avec « un grand couteau de cuisine ». Il était réputé faire partie d'un autre de ces « complots » terroristes inspirés de l'EI dont il semble peu probable qu'ils puissent un jour être mis en œuvre avec succès. Une tuerie de masse a également eu lieu. Un homme blanc, raciste, âgé de 21 ans, est entré dans une église noire historique de Charleston, en Caroline du Sud, et a ouvert le feu, perpétrant une attaque qu'on aurait qualifiée de terroriste s'il avait été musulman, et tuant neuf personnes, y compris le pasteur de l'église, qui était aussi un sénateur de Caroline du Sud. Ainsi que Reuters l'a rapporté, ce massacre « rappelait l'attentat à la bombe commis contre une église afro-américaine de Birmingham (Alabama) qui avait provoqué la mort de quatre jeunes filles en 1963 et avait galvanisé le mouvement en faveur des droits civiques des années 1960. » On a aussi recensé au moins un autre coup de feu, tiré par un enfant en bas âge. Un enfant de trois ans, de Cincinnati, a trouvé l'arme de sa mère dans son sac à main, s'est tiré une balle dans la poitrine, et est décédé.  On a aussi recensé au moins un cas de plus de mission suicide : un homme, originaire de l'État du Vermont, recherché par la police pour le meurtre de son ex-petite amie, s'est engagé dans une course-poursuite effrénée avec la police avant de s'écraser sur la route et de se suicider avec une arme à feu. On a recensé un certain nombre de meurtres de policiers, y compris : un homme en période d'essai qui se trouvait dans un hôtel de South Lake Tahoe, un homme de 28 ans, qui s'était engagé dans une course-poursuite à Stockton, en Californie, un homme de 28 ans, non armé mais « au comportement suspect », qui se trouvait dans la ville de Des Moines, État de l'Iowa, un homme qui a poignardé un policier tentant de l'arrêter dans le quartier Brighton Beach de la ville de New York, et un homme identifié provisoirement comme étant africain à Louisville, État du Kentucky, accusé d'avoir violemment menacé la police avec un porte-drapeau (avec les habituelles histoires contradictoires relatées par la police et par les témoins oculaires quant à ce qui s'est réellement passé). Et, dans le contexte de cette succession impressionnante d'actes de violence perpétrés aux États-Unis, nous ferions mieux de ne pas oublier le sergent de police de la municipalité de Neptune, New Jersey, qui était au repos lorsqu’il a poursuivi son ex-femme dans sa voiture, l'a rattrapée et l'a abattue devant leur fille de sept ans avant de menacer de se suicider et d'être arrêté par la police, ou encore le garde de sécurité d'un centre commercial de la ville d'Iowa City, qui, de toute évidence, avait été licencié plus tôt dans la journée, et qui est allé chercher une arme puis est retourné au centre commercial pour tuer une employée, âgée de 20 ans, du musée pour enfants, qu'il avait harcelée auparavant. Il s'est enfui, mais a été rapidement arrêté par la police. Dans le même temps, un jeune homme perturbé mentalement, qui entretenait une certaine rancune à l'égard de la police, a acheté un fourgon blindé sur eBay (« présenté comme un "véhicule d'assaut de zombies pour apocalypse ", muni d'"embrasures" permettant de "faucher tout en conduisant" et de fenêtres entièrement blindées et résistantes aux balles, "au cas où quelqu'un essayerait de t'attraper" »). Il a ensuite fabriqué des bombes tuyaux, s'est muni d'un fusil d'assaut et d'un fusil de chasse, et s'est rendu, dans son véhicule, au quartier général de la police de Dallas avant de lancer une attaque massive sur place. Miraculeusement, il n'a pu tuer personne, malgré le fait que son fourgon se soit écrasé sur plusieurs voitures de police, et il a fini par être abattu par un tireur d'élite de la police. Et, dernier point, mais non des moindres, des coups de feu ont été tirés pas loin de chez moi. Trois jeunes hommes, du quartier de Brooklyn, New York, ont été blessés par balle dans un complexe de terrains de jeux construit dans le cadre d'un projet d'habitation (et nommé d’après un garçon de 13 ans du voisinage tué par un policier en 1994). Une personne que je connais donne des cours dans ce même lieu. Le tireur est toujours en cavale.
 

- Tom Engelhardt est un des co-fondateurs de la série de livres American Empire Project (« Projet d'un empire américain ») et l'auteur de The United States of Fear (« Les États-Unis de la peur ») et d'un livre sur l'histoire de la Guerre froide, The End of Victory Culture (« La fin de la culture de la victoire »). Il est membre de l'association Nation Institute et gère le site internet TomDispatch.com. Le dernier de ses livres est Shadow Government: Surveillance, Secret Wars, and a Global Security State in a Single-Superpower World (« Gouvernement fantôme : surveillance, guerres secrètes et établissement d'un État de la sécurité internationale dans un monde gouverné par une superpuissance unique »).  

Copyright 2015 Tom Engelhardt. Cet article est d'abord paru sur le site internet TomDispatch.com.

Les opinions exprimées dans cet article n'engagent que leur auteur et ne reflètent pas nécessairement la politique éditoriale de Middle East Eye.

Photo : photo non datée tirée du site internet lastrhodesian.com le 20 juin 2015, montrant supposément Dylann Roof, accusé d'avoir abattu neuf personnes dans une église noire à Charleston, en Caroline du Sud (AFP/lastrhodesian.com ). 

Traduction de l’anglais (original) par STiil Traduction.

Middle East Eye propose une couverture et une analyse indépendantes et incomparables du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et d’autres régions du monde. Pour en savoir plus sur la reprise de ce contenu et les frais qui s’appliquent, veuillez remplir ce formulaire [en anglais]. Pour en savoir plus sur MEE, cliquez ici [en anglais].