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Israël installe des postes de contrôle à une porte de Jérusalem pour « chasser les Palestiniens »

Les nouveaux postes de contrôle à la porte de Damas, selon des habitants, relèvent d’une tentative israélienne de prise de contrôle totale de Jérusalem
Des Palestiniens agitent le drapeau national lors d’une manifestation porte de Damas à l’occasion de la Journée de la Terre, en mars 2015 (AFP)

JÉRUSALEM – Israël installe des postes de contrôle permanents à une entrée clé de la vieille ville de Jérusalem dans le but d’empêcher l’entrée des Palestiniens qui y ont déjà un accès limité, indiquent des habitants à Middle East Eye.

Le chantier dans le secteur de la porte de Damas – l’une des entrées les plus populaires empruntées par les Palestiniens – a commencé quelques semaines après que le président américain Donald Trump a reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël.

« Nous assistons à des procédés militaires et policiers employés au nom de la sécurité pour chasser les Palestiniens de leur ville »

– Mahdi Abdul Hadi, directeur de la Société académique palestinienne pour l’étude des affaires internationales

Les Palestiniens vivant à Jérusalem affirment que les nouveaux postes de contrôle visent à créer « des faits sur le terrain » pour modifier le statu quo actuel de Jérusalem en tant que ville occupée.

« Les postes de contrôle à la porte de Damas visent à paralyser tous les mouvements sociaux, religieux et ceux de jeunesse sur ce site », affirme Mahdi Abdul Hadi, directeur de la Société académique palestinienne pour l’étude des affaires internationales (PASSIA), basée à Jérusalem.

« Cela se passe avec le feu vert du nouveau Washington de Trump et de certains pays arabes. »

La situation à la porte de Damas survient alors que l’armée israélienne domine et contrôle désormais Jérusalem, selon Daoud al-Ghoul, un habitant palestinien de Jérusalem.

« Dans les pièces de ces postes de contrôle en béton, les soldats israéliens pourront arrêter et fouiller les Palestiniens à l’écart des caméras des médias », prévient al-Ghoul. « Personne ne saura ce qui se passe derrière ces murs de béton. »

La construction de postes de contrôle en béton à la porte de Damas est en cours (MEE/Mustafa Abu Sneineh)

La façon dont le chantier a progressé est venue s’ajouter aux préoccupations des habitants : le 8 janvier, les autorités israéliennes ont érigé des barrières autour du site et affiché un avis indiquant que toute personne ayant des inquiétudes sur le projet avait quatorze jours pour déposer une réclamation.

Néanmoins, selon des médias locaux, le chantier a commencé lorsque deux arbres ont été déracinés sur le site avant même que la barrière et le panneau n’aient été dressés.

Susciter la peur

Le secteur autour de la porte de Damas – que les Palestiniens appellent Bab al-Amoud – est un lieu populaire où les Palestiniens se rassemblent, boivent du café et chantent des chansons nationales en signe de protestation civile. Il a également été le théâtre de manifestations plus officielles et d’affrontements violents entre des manifestants et la police israélienne.

En octobre 2015, au cours d’une vague de violence déclenchée par des tensions politiques, de jeunes Palestiniens ont tenté de poignarder des policiers militaires israéliens lors d’incidents survenus près de la porte. Ils ont été abattus, tandis que les images des tentatives d’attaque au couteau ont été largement diffusées.

Depuis lors, l’armée israélienne emploie des postes de contrôle temporaires faits de panneaux en plastique et d’échafaudages pour arrêter et fouiller au hasard les Palestiniens empruntant la porte. 

« Les autorités israéliennes essaient de susciter chez les gens la peur d’être déshabillés et fouillés à l’intérieur de ces postes de contrôle en béton chaque fois qu’ils voudront franchir la porte de Damas », affirme Jamil Hidmi, propriétaire d’une boutique de fleurs dans la vieille ville.

En plus des postes de contrôle, Israël a récemment installé au niveau de la porte des caméras de surveillance équipées de détecteurs de son.

Al-Ghoul craint qu’Israël hisse des drapeaux sur le site, ce qui altèrerait ce lieu historique et constituerait une violation d’une résolution de l’UNESCO qui confirme l’importance de la vieille ville et de ses murs pour les trois religions monothéistes.

Bien qu’il existe d’autres entrées pouvant être utilisées, la sécurité accrue à la porte de Damas est un affront de plus pour les Palestiniens qui sont fréquemment interdits d’accès à la mosquée al-Aqsa dans la vieille ville depuis de nombreuses années.

« Personne ne saura ce qui se passe derrière ces murs de béton »

– Daoud al-Ghoul, habitant palestinien de Jérusalem

Par exemple, les Palestiniens de Cisjordanie ne sont pas autorisés à se rendre librement à Jérusalem depuis la seconde Intifada, en septembre 2000. Au lieu de cela, ils doivent demander un permis auprès de l’Administration civile israélienne qui ne les distribue généralement que pendant le mois du Ramadan.

Les Palestiniens titulaires d’une carte d’identité de Jérusalem et âgés de moins de 50 ans sont également régulièrement interdits d’entrée à al-Aqsa pendant les prières du vendredi.

Depuis la reconnaissance de Jérusalem par Trump, les habitants affirment que les fouilles de sécurité – y compris les contrôles d’identité et des sacs – ont augmenté à al-Aqsa et à la porte de Damas.

Selon Abdul Hadi, les autorités israéliennes ont récemment imposé des taxes élevées sur les propriétés appartenant au Waqf islamique de Jérusalem, une fiducie religieuse palestinienne, tout en encourageant les partis politiques israéliens ainsi que les écoles et organisations juives à se déplacer dans la vieille ville et à y travailler.

Les postes de contrôle actuels, fabriqués à partir d’échafaudages et de bois, photographiés le 30 janvier, seront remplacés par des structures en béton (MEE/Mustafa Abu Sneineh)

À ses yeux, les postes de contrôle ne sont que le dernier effort en date des Israéliens qui tentent de prendre totalement le contrôle de Jérusalem.

« Premièrement, le gouvernement israélien traduit sur le terrain la déclaration de Trump de Jérusalem en tant que capitale israélienne », explique-t-il. « Deuxièmement, il modifie le statu quo de Jérusalem en tant que ville occupée et marginalise la garde hachémite des lieux saints islamiques et chrétiens en maintenant une forte présence militaire sur ces sites islamiques et chrétiens. Jérusalem est devenue une ville militaire. Troisièmement, il s’agit de dessiner une carte israélienne qui exclut les quartiers palestiniens de la vieille ville. Nous assistons à des procédés militaires et policiers employés au nom de la sécurité pour chasser les Palestiniens de leur ville. »

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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