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L’agresseur de Notre-Dame « ne cachait pas sa sympathie pour l’islam intégriste »

MEE a recueilli le témoignage d'un journaliste algérien qui a bien connu Farid Ikken, l'étudiant algérien de 40 ans qui, mardi, a attaqué un policier au marteau devant la cathédrale de Notre-Dame à Paris
Des policiers français devant la cathédrale Notre-Dame mardi 6 juin après l'attaque de l'un d'entre eux par un assaillant se réclamant du groupe État islamique (AFP)

ALGER – « On s’accrochait souvent lorsqu’on discutait. J’ai des positions anti-intégristes très tranchées alors que Farid est quelqu’un de très religieux. Quand je l’ai connu, il était pratiquant et il ne buvait pas l’alcool, ce qui, pour un journaliste francophone kabyle, est très rare ! ».

Djamel Alilat, journaliste au quotidien francophone de référence El Watan, en Algérie, connaît bien Farid Ikken, l’assaillant qui, mardi 6 juin, a attaqué un policier sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame à Paris avec un marteau. Né en Algérie en janvier 1977, il était, selon ses papiers, arrivé en France en 2014.

« Avant son départ, il avait été recruté à El Watan, au bureau régional de Béjaïa [en Kabylie] en 2012, car sa famille vit à Akbou [à une cinquantaine de kilomètres de Béjaïa] et nous parlions beaucoup de tout, de notre métier – c’était un très bon journaliste –  de sujets d’actualité, etc.… Et il ne cachait pas sa sympathie pour l’islam intégriste. Mais je n’aurais imaginé qu’il puisse passer à l’acte. »

Un témoignage qui va dans le sens de celui du directeur de thèse de Farid Ikken, Arnaud Mercier, qui le connaît depuis 2013, « tombé de sa chaise » en apprenant l'implication de son étudiant. « Le Farid que j'ai connu est aux antipodes de tout ce qu'on décrit », a-t-il affirmé à l'AFP. Son étudiant « doux comme un agneau », « défendait des valeurs de la démocratie ».

« Une succession de déceptions qui auraient nourri un terrain dépressif »

Depuis l’agression, au cours de laquelle l’étudiant de 40 ans a revendiqué être « un soldat du califat », d’autres indices indiquent qu’il avait rejoint le groupe État islamique. Notamment une vidéo, retrouvée par les policiers dans son appartement de Cergy, en banlieue parisienne, dans laquelle il prête allégeance à l'EI.

Pour Djamel Alilat, plusieurs choses pourraient expliquer son passage à l’acte. « Il était parti vivre en Suède, où il s’était marié, et où il travaillait comme journaliste. Et puis en 2012, il a tout plaqué pour rentrer en Algérie », témoigne-t-il. « À ce moment-là, il a essayé de lancer son site d’informations, ‘’Béjaïa aujourd’hui’’. Mais ça n’a pas marché et au bout de quelques mois, le site a fermé. C’est là qu’il est entré à El Watan avant de partir en France pour reprendre ses études. Je ne l’ai plus revu depuis mais je suis intimement convaincu que cette succession de déceptions – son expérience suédoise fut un échec, il n’a pas réussi à trouver sa place dans son pays – a nourri un terrain dépressif. »

Farid Ikken, qui était également muni de deux couteaux de cuisine, a crié « c'est pour la Syrie » au moment où il frappait le policier, a précisé le ministre français de l'Intérieur Gérard Collomb, sans doute en référence à la coalition militaire internationale à laquelle participe la France pour éradiquer l'EI en Irak et Syrie.

Selon Christophe Castaner, le porte-parole du gouvernement, Farid Ikken n'avait pas « donné de signes de sa radicalisation » et toutes les indications abondent dans le sens « d'un acte isolé ».

Blessé au thorax par un tir de riposte, l'agresseur a été placé mercredi en garde à vue à l'hôpital. 

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