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« Nous jouerons notre rôle », affirme une volontaire des Casques blancs

Une centaine de femmes sont volontaires au sein de la Défense civile syrienne, plus connue sous le nom de Casques blancs, en Syrie
Abir Moussa, volontaire auprès des Casques Blancs à Deraa (Syrie), le 23 octobre 2016 (AFP)

Si les membres de la Défense civile syrienne en Syrie, mieux connus sous le nom de Casques blancs, sont des humanitaires courageux célébrés à travers le monde, on sait peu de choses sur la contribution des femmes qui composent ce groupe.

« Les femmes constituent une partie essentielle du travail de secours », a déclaré à Middle East Eye Manal Abazeed, volontaire auprès des Casques Blancs, assise dans un café calme de Londres, près de la Tamise.

« Nous continuerons de jouer notre rôle aussi longtemps qu’il le faudra », a déclaré Manal, qui retournera dans quelques jours sur la ligne de front de la ville de Deraa, dans le sud-ouest de la Syrie.

La femme de 46 ans rayonnait de fierté en évoquant le travail qu’elle accomplit avec les autres femmes volontaires en tant que membres des équipes de recherche et de sauvetage.

Avec Gardenia, une autre volontaire, Manal a accepté ce mardi un prix de reconnaissance au nom de la centaine de femmes travaillant comme volontaires auprès des Casques blancs à travers la Syrie.

« J’ai eu l’honneur de recevoir ce prix au nom de mes sœurs, a affirmé Manal à MEE. Mais j’ai été peinée de le recevoir alors que tant de gens continuent de mourir dans mon pays. »

Manal Abazeed est volontaire auprès des Casques blancs depuis avril 2015 (Olivia Alabaster/MEE)

Les Casques blancs dirigent un service de secours dans les régions de Syrie sous contrôle rebelle qui font l’objet de violents bombardements orchestrés par le gouvernement et l’armée de l’air russe au cours de la guerre civile qui ravage le pays et qui a rasé des quartiers entiers dans des villes.

Sarah Brown, présidente de Theirworld, l’association caritative travaillant auprès des enfants qui a remis le prix à Manal avant la Journée internationale des droits des femmes, a déclaré ce mercredi à ITV : « Bien que la plupart du temps, les gens pensent aux hommes des Casques blancs qui se précipitent pour sauver des vies, nous avons souhaité aujourd’hui honorer les femmes qui travaillent inlassablement et courageusement. »

« Au bout de quelques mois, nous étions avec les hommes dans les ambulances et sur les lignes de front »

– Manal, volontaire auprès des Casques Blancs

Exerçant à l’origine une profession de comptable, Manal est ambulancière volontaire auprès des Casques blancs depuis deux ans. Elle a décidé de consacrer son temps à sauver les victimes de la guerre lorsque son père est décédé d’un cancer en raison du manque de soins médicaux dans sa ville natale.

« Nous ne pouvions pas l’emmener à l’hôpital à cause du siège et des frappes aériennes », a raconté Manal, retenant ses larmes.

« Lorsqu’il est décédé, j’ai décidé de rejoindre les Casques blancs pour pouvoir apprendre à m’aider et à aider les autres autour de moi », a-t-elle ajouté.

Pendant les premières années de la guerre, de nombreux groupes de recherche et de sauvetage formés par des civils syriens œuvraient à travers la Syrie sous différents noms. En octobre 2014, les différents groupes ont toutefois accepté une déclaration de principes et un code de conduite uniques, s’unissant pour former la force de Défense civile syrienne, avant d’être baptisés « Casques blancs » par des ONG et des admirateurs.

Des campagnes de sensibilisation

Manal se spécialise dans la sensibilisation de l’opinion publique à la sécurité en cas d’attaques, la formation au sujet des armes explosives, les consultations traumatologiques et les accouchements.

Selon elle, la sensibilisation a été particulièrement importante pour aider les familles à faire face à la guerre et apprendre à assurer autant que possible leur sécurité.

« Les enfants ramassaient des armes et jouaient avec sans savoir ce que c’était [...], tuant ainsi ceux qui se trouvaient autour, a expliqué Manal. Nous sommes allés leur enseigner ces choses. »

À Lire : Un documentaire sur les Casques blancs qui servira un jour à « punir les criminels de guerre »

Comme Manal, Gardenia, âgée de 33 ans, qui a également commencé à travailler comme volontaire auprès des Casques blancs à Deraa en 2015, a déclaré que le rôle des femmes était également unique dans l’aide au transport de fournitures médicales d’un endroit à un autre.

« Bien que ce ne soit plus le cas aujourd’hui, lorsque nous avons commencé, il était moins probable de voir la police arrêter et fouiller une femme. Nous étions chargées de transporter l’aide et les fournitures aux hôpitaux de campagne et aux cliniques », a expliqué Gardenia.

Bien que les premières femmes à rejoindre le groupe de secours n’aient pas été facilement acceptées, la communauté a progressivement reconnu le rôle vital joué par les femmes, ont indiqué les femmes.

« Au début, nous allions seulement dans les écoles et les habitations pour aider à sensibiliser, mais au bout de quelques mois, nous étions avec les hommes dans les ambulances et sur les lignes de front », a expliqué Manal.

Manal Abazeed (à droite) et Sara Brown, présidente de Theirworld, à Londres (Royaume-Uni), le 7 mars 2017 (Theirworld)

Selon Gardenia, les hommes et les femmes endossent la même responsabilité d’aider et de secourir les victimes lorsqu’une frappe aérienne se produit.

Gardenia, qui a appris les bases des travaux de premiers secours et de sauvetage en étant volontaire auprès du Croissant-Rouge avant de rejoindre les Casques blancs, aide aujourd’hui à coordonner les travaux du groupe de Défense civile syrienne depuis l’étranger. Elle a dû quitter la Syrie, se sentant de plus en plus menacée à Deraa.

« Après avoir travaillé avec le groupe pendant plusieurs mois, j’ai fini par être connue des autorités et je ne pouvais plus rester en Syrie », a-t-elle expliqué.

Des allégations rejetées

Malgré les dangers auxquels elle a dû faire face pour travailler avec le groupe, Gardenia a déclaré que rejoindre les Casques blancs constituait une étape naturelle pour elle comme pour les nombreuses femmes qui continuent de rejoindre aujourd’hui le groupe de secours.

« En voyant des médecins et des infirmiers être pris pour cible et détenus, nous, les gens ordinaires, devions faire un effort et faire ce que nous pouvions », a-t-elle affirmé.

Bien qu’un documentaire consacré au groupe de protection civile ait remporté un Oscar cette année, certaines personnes ont accusé le groupe de soutenir les groupes rebelles contre le gouvernement syrien.

Gardenia a répondu à ces allégations : « En tant qu’humanitaires, nous ne nous arrêtons pas pour demander à un homme ou une femme quelle est son affiliation alors que cette personne est blessée [...] Nous n’avons pas le temps pour cela et nous ne nous soucions pas de cela. »

« Nous aidons tout le monde, n’importe où, quelle que soit l’affiliation politique ou religieuse, a assuré Gardenia. Ces allégations exaspérantes et totalement infondées ont servi à entacher tous les efforts positifs déployés en Syrie. »

Bien que les deux femmes aient été confrontées à la mort à plusieurs reprises au cours de leur travail, toutes deux gardent espoir pour l’avenir et affirment qu’elles continueront de jouer leur rôle, même après la fin de la guerre.

« Nous aiderons à remettre notre pays sur pied et à ramener notre peuple en Syrie, a soutenu Manal. Nous avons fait un travail considérable, mais il reste encore beaucoup à faire. »

Avec l’aide d’Olivia Alabaster.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation

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