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Algérie : Bouteflika parle de « continuité » cinq mois avant la présidentielle de 2019

Dans un discours lu en son nom mercredi 28 novembre, le chef de l’État algérien semble décidé à briguer un cinquième mandat lors de la présidentielle du printemps 2019
Le président algérien Abdelaziz Bouteflika à la sortie d’un bureau de vote à Alger lors des élections locales de novembre 2017 (AFP)
Par MEE

« Le président Abdelaziz Bouteflika compte rester au pouvoir, durant le prochain quinquennat », écrit le quotidien algérien El Watan. Le journal note plusieurs passages dans un discourslu par le secrétaire général de la présidence lors de la réunion entre le ministre de l’Intérieur et les walis (préfets). 

« Nous nous apprêtons, dans l’étape à venir, à aller vers un processus dont les enjeux sont le défi de la qualité, l’efficacité économique et l’intégration du développement durable », lit-on dans le message présidentiel. 

Contexte confus

« Les formules ‘’l’étape à venir’’ et ‘’nous continuerons’’ laissent comprendre que le locataire d’El Mouradia [siège de la présidence], ou plutôt de la résidence de Zéralda [résidence médicalisée du président], envisage de se représenter à l’élection présidentielle de 2019, en dépit de son état de santé », analyse El Watan

Le président algérien, âgé de 82 ans, affaibli par la maladie et qui ne s’est pas exprimé publiquement depuis 2012, est au pouvoir depuis avril 1999, date d’une présidentielle anticipée où il avait été le seul candidat. Ses adversaires s’étaient alors retirés de la course, jugeant que les garanties d’une élection transparente n’étaient pas réunies.    

Ces déclarations interviennent dans un contexte confus : aucune candidature lourde ne s’est profilée à cinq mois de la présidentielle. « Cette élection ne comporte aucun enjeu, tranche un ancien haut responsable qui a répondu à MEE sous le couvert de l’anonymat. Tout le monde consent à une prolongation du bail du président ».

D’autres observateurs font une autre lecture de la sortie du président. Car le discours lu en son nom emploie un langage plus violent, contrastant avec l’habituel ton consensuel et plat.

« Aussi, est-il normal que la stabilité de notre pays soit ciblée par des cercles de prédateurs et de cellules dormantes qui s’acharnent à attenter à sa crédibilité et à la volonté de ses enfants », lit-on dans le message attribué au président. 

« Les manœuvres politiciennes que nous observons à l’approche de chaque échéance cruciale pour le peuple algérien est la preuve tangible de ces intentions inavouées, qui s’éclipsent dès que notre valeureux peuple leur tourne le dos », dit le message du président.

Un cinquième mandat incertain ?

Pour le site d’information TSA, « Bouteflika a peut-être confirmé qu’il a bien l’intention de briguer un cinquième mandat et que des résistances se dressent devant le projet. D’où émanent ces résistances ? Mystère. Mais la rhétorique utilisée par Bouteflika, qui ne désigne jamais ses cibles, laisse penser qu’il vise des parties internes et externes ». 

La porte-parole du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, qui était un des soutiens du chef de l’État, a considéré pour sa part que, au sein du système, « il n’est pas question pour le moment d’un candidat du consensus pour la prochaine présidentielle ». 

« La rumeur parle de plusieurs candidats dans les institutions, des ambitions individuelles… mais ce n’est pas encore affiché officiellement », a déclaré la militante trotskyste lors d’une conférence de presse mercredi 28 novembre.

« Il n’est pas question pour le moment d’un candidat du consensus pour la prochaine présidentielle » 

- Louisa Hanoune, porte-parole du Parti des travailleurs

Le Front de libération national (FLN), parti dont Bouteflika est le président – un poste purement honorifique et symbolique – avait annoncé que le chef de l’État serait son candidat à la présidentielle de 2019. 

Ce même parti subi depuis plusieurs semaines des turbulences organiques et politiques avec le limogeage de son secrétaire général, Djamel Ould Abbès, et la dissolution de ses instances internes. 

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Une manière de mettre en veilleuse cette machine électorale, selon certains. Une purge nécessaire contre les forces de l’argent pour mieux préparer les prochaines échéances, selon d’autres.

Dans son édition du 25 novembre, le très influent journal britannique The Financial Times a publié un article critiquant la thèse d’un cinquième mandat du président algérien. « Ceci serait un acte de ce qui est connu en Algérie comme ‘’hogra’’Hograest une expression unique à l’Algérie décrivant le mépris d’un groupe pour un autre, en l’occurrence celui de l’élite dirigeante envers le peuple », écrit son auteur. 

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