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Des membres de l'UE se plaignent de l’envoi par la Turquie de réfugiés malades et peu instruits

La Turquie nous envoie des Syriens malades et peu instruits, se plaignent des membres de l'UE, alors qu’Ankara refuse d'envoyer des universitaires syriens
Depuis le début de l’application d’un accord controversé d’échange de réfugiés, environ 400 personnes ont été expulsées d’Europe vers la Turquie (AFP)
Par MEE

D’après un article publié samedi par le quotidien allemand Der Spiegel, des membres de l'UE se sont plaints à la Turquie de l'envoi vers l’Europe de Syriens malades dans le cadre d'un accord controversé d’échange de migrants.

En vertu de l’accord entré en vigueur en mars, l'UE se charge de réinstaller un réfugié syrien bloqué dans un camp turc en échange de chaque demandeur d'asile expulsé vers la Turquie après son arrivée en Europe par bateau.

En vertu de cet accord, 400 personnes environ ont été jusqu'à présent renvoyées en Turquie, ce qui en théorie signifie que 400 autres ont été réinstallées en Europe.

Cependant, outre les complications juridiques relatives à l'accord, l’article de Der Spiegel suggère que les tensions sur certains détails risquent également de le remettre en question.

Lors d'une récente réunion interne de l'UE à Bruxelles, un représentant du Luxembourg aurait critiqué la Turquie pour avoir, dans le cadre de l’accord, envoyé des Syriens atteints de « maladies graves » et les moins instruits d’entre eux.

Cette semaine, le secrétaire d'État parlementaire au ministère de l’Intérieur allemand, Ole Schroeder, s’est lui aussi plaint devant le Parlement de son pays que la Turquie n'envoie pas à l’Europe les Syriens les plus qualifiés.

La Turquie a informé le HCR, l'agence des réfugiés de l'ONU, que les universitaires syriens seraient exclus de l’accord et ne pourraient donc pas être réinstallés en Europe.

Le HCR est habituellement responsable d'identifier les personnes éligibles aux programmes de réinstallation des réfugiés mais, dans ce cas précis, la Turquie a insisté pour se charger elle-même de la sélection des candidats.

Ces dernières semaines, les politiciens turcs ont menacé à plusieurs reprises de suspendre le programme s’il n’était pas accordé aux citoyens turcs de se déplacer sans visa vers l'Europe, source d’un ressentiment croissant entre l'UE et la Turquie.

La légalité du programme, fortement critiqué pour immoralité par des groupes de défense des droits de l’homme, a été de nouveau mise en doute vendredi lorsqu’un tribunal d'appel grec indépendant a estimé qu'il serait illégal d'expulser un demandeur d'asile syrien vers la Turquie.

Les trois juges du tribunal d'appel basé à Lesbos ont conclu que la Turquie ne respecte pas les traités internationaux régissant les droits de l'homme, invalidant de ce fait la déportation forcée du requérant.

Le verdict du tribunal était le suivant : « Le comité estime que la protection temporaire susceptible d’être offerte par la Turquie au requérant, en sa qualité de citoyen syrien, ne lui offre pas de droits équivalents à ceux prévus par la Convention de Genève ».

Ce jugement suggère que le renvoi des demandeurs d'asile vers la Turquie pourrait violer les droits de l'homme, ce qui est susceptible de créer un précédent et de remettre sérieusement en question la pérennité de l’accord.

Traduit de l’anglais (original) par Dominique Macabies.

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