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Ryad pourrait imposer des taxes et ouvrir le royaume aux ONG de défense des droits de l’homme

Après les rumeurs de coup d’État et les craintes concernant l’économie et la situation des droits de l’homme dans le pays, les autorités saoudiennes font part d’une nouvelle vision stratégique à un journal britannique
Le roi Salmane ben Abdelaziz d’Arabie saoudite préside une réunion à Riyad cette semaine (AFP)
Par MEE

L’Arabie saoudite envisage de réduire les dépenses du pays, éventuellement en empruntant de l’argent et en imposant des taxes pour la première fois, selon un programme détaillé envoyé au Telegraph par le roi Salmane et ses conseillers.

Ce document suggère également que le royaume va ouvrir ses portes aux organisations internationales des droits de l’homme et reconnaît que la question des droits des femmes a été mal gérée.

« La question des femmes en Arabie saoudite est devenue un enjeu mondial d’opinion publique et il semble que nous avons perdu beaucoup dans cette affaire [en termes d’opinion publique] », selon le programme. « [Toutefois, cela] était juste parce que nous n’avions pas corrigé la façon dont nous gérions la question. »

Ce communiqué intervient après que les dirigeants saoudiens – avec des rumeurs de coup d’État, une catastrophe lors du hadj et les préoccupations économiques – ont été soumis à une pression croissante ces derniers mois tant au niveau national qu’international.

En septembre, MEE avait révélé qu’un éminent membre de la famille royale saoudienne avait envoyé une lettre aux princes exprimant la crainte d’un effondrement de la monarchie à moins que le roi soit remplacé sans tarder.

La baisse des prix du pétrole a également fait craindre que le déficit budgétaire croissant du pays érode rapidement ses réserves si des mesures radicales ne sont pas prises.

Le royaume a également été scruté suite à la bousculade des pèlerins lors du hadj, le 24 septembre dernier. Les responsables saoudiens avaient initialement indiqué que 769 personnes étaient mortes dans l’incident, mais une enquête de MEE a révélé que le nombre de morts était d’au moins 2 432 victimes.

Le cas d’Ali al-Nimr, adolescent de 17 ans qui a été condamné à mort par décapitation et crucifixion pour son implication dans les manifestations inspirées du Printemps arabe dans l’est de l’Arabie saoudite en 2012, a également attiré les critiques de la communauté internationale et serait à l’origine de l’abandon par le Royaume-Uni d’un contrat de consultant pour la formation de gardiens de prison de plusieurs millions de dollars avec le pays.

Quelques jours après l’annulation de ce contrat, l’ambassadeur saoudien au Royaume-Uni, Mohammed bin Nawaf bin Abdelaziz, avait écrit un éditorial, également publié dans le Telegraph, dans lequel il déclarait que l’Arabie saoudite ne se laisserait pas « sermonner ».

« Si les liens commerciaux très étroits entre les deux pays sont subordonnés à certaines idéologies politiques, alors cet échange commercial essentiel sera en danger », écrivait-il. « Nous voulons que cette relation se poursuive, mais nous ne nous laisserons sermonner par personne. Les décisions hâtives motivées par les gains à court terme font souvent plus de mal que de bien au long terme. »

Les extraits du programme saoudien, publiés dans le Telegraph jeudi et apparemment préparés par les membres de la cour royale et le conseil économique du pays, semblent adopter un ton beaucoup moins inflexible que la lettre d’Abdelaziz.

Il y est reconnu que, étant donné que 80 à 85 % des revenus de l’Arabie saoudite dépendent des revenus du pétrole, la baisse des prix a fait réfléchir les dirigeants saoudiens à la possibilité d’emprunter de l’argent ou éventuellement de taxer les citoyens pour la première fois.

Alors que plus de 30 % du budget est identifié dans le programme comme du gaspillage, les responsables semblent indiquer qu’ils prévoient de réduire les subventions, d’augmenter les dépenses dans les infrastructures et de diversifier les sources de revenu, y compris par des partenariats avec le Royaume-Uni, les États-Unis et la France peut-être dans le domaine de la technologie.

Sur la question des droits des femmes dans le pays, le programme, tel que rapporté par le Telegraph, souligne que le pays aurait dû être plus ouvert aux réformes, mais a été freiné par « son histoire et sa tradition populaire ». On ne sait pas si des changements spécifiques concernant les Saoudiennes ont été détaillés dans le document.

« Nous avons parcouru un long chemin et on ne peut pas sous-estimer les efforts déployés au cours des dernières années pour mettre en valeur le rôle des femmes dans la société et leur donner les droits qu’elles méritent », serait-il indiqué.

Les autorités respectent la sentence prononcée contre Ali al-Nimr et son oncle, cheikh Nimr al-Nimr, qui a également été condamné à mort par décapitation.

« Les membres de la famille al-Nimr ont commis des violences et des attaques contre les forces de sécurité et des installations gouvernementales en plus d’avoir terrorisé des civils et perpétré des actes de vandalisme », selon le document. « C’est un acte criminel évident qui a conduit au meurtre de policiers... Nous sommes en droit d’assurer la sécurité de nos citoyens et nous ne pouvons pas comprendre qu’on nous demande de le laisser impuni. »

 

Traduction de l’anglais (original) par VECTranslation.

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