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Égypte : les Gilets jaunes, le nouvel épouvantail des pro-Sissi

« Pillage », « destruction », « chaos » : certains médias égyptiens proches du président Abdel Fattah al-Sissi ont choisi de critiquer le mouvement des Gilets jaunes en France
Sur les réseaux sociaux en arabe, le hashtag Al-Satarat Al-Safra (Gilets jaunes) est un des plus partagés (AFP)
Par MEE

« Un tsunami de la peur envahit la France », « La police française se prépare pour affronter de violentes protestations » ou encore « Le gouvernement français promet d’affronter fermement les violentes protestations » : c’est avec ces titres que certains médias égyptiens ont choisi de couvrir le mouvement des Gilets jaunes, lancé en France le 17 novembre pour dénoncer la hausse des taxes sur les carburants. 

« Violence », « chaos », « apocalypse » : pour quelles raisons ces médias pro-gouvernementaux utilisent-ils cette terminologie et pourquoi s’intéressent-ils aux Gilets jaunes ? 

Selon le sociologue égyptien Said Sadek, ce choix médiatique est délibéré, « pour décourager les Égyptiens de marcher dans les pas des Gilets jaunes » et « préserver ainsi la stabilité du régime actuel ». « En parallèle, ces médias n’hésitent pas à critiquer la réaction du gouvernement français pour narguer l’Occident suite à son soutien au Printemps arabe », explique-t-il à l’agence de presse officielle turque, Anadolu.

Safwat al-Alam, spécialiste égyptien de l’opinion publique, souligne par ailleurs pour Anadolu, la « similarité » entre la couverture des protestations des Gilets jaunes et celle de la révolution égyptienne en 2011 par les médias pro-Sissi. 

Certains internautes égyptiens ont également critiqué le mouvement des Gilets jaunes en le décrivant comme « destructeur » et en l’opposant aux gilets jaunes portés par des Égyptiens en compagnie du président Abdel Fattah al-Sissi sur un chantier. 

Traduction : « En Égypte, les gilets jaunes construisent et chez eux [en France], ils détruisent » 

D’autres ont qualifié les Gilets jaunes d’« islamistes qui veulent renverser le gouvernement français et semer la discorde ».

Traduction : « Que Dieu guide les islamistes de Paris qui veulent renverser le gouvernement et semer la discorde » 

Les internautes égyptiens ne sont pas les seuls à avoir utilisé le terme « islamiste ».

Al-Masri al-Youm, un média égyptien proche du gouvernement, a publié une première analyse dans laquelle il explique que derrière les « pillages et destructions » lors des manifestations des Gilets jaunes, se trouve une « organisation secrète des Frères musulmans en Europe », avant de changer le titre et de publier « Quatre importantes questions sur les protestations en France… Où les Gilets jaunes veulent-ils en venir ? », un nouvel article dénonçant « la responsabilité de Daech » derrière les protestations. 

Capture d’écran du premier article publié par Al-Masri al-Youm, évoquant la responsabilité des Frères musulmans derrière le mouvement des « gilets jaunes »

Plusieurs internautes et spécialistes dans le reste du monde arabe ont aussi commenté les derniers événements en France en utilisant le hashtag Al-Satarat Al-Safra (traduction en arabe de Gilets jaunes), lequel figure depuis quelques jours parmi les plus utilisés sur la toile en arabe. 

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