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Le Maroc ne compte pas interdire les tests de virginité

Deux mois après l’appel mondial de l’OMS à interdire les tests de virginité, le Maroc élude le problème en affirmant qu’« ils ne sont pas obligatoires »
Au Maroc, le certificat de virginité peut être réclamé par la famille du futur époux avant un mariage (AFP)

CASABLANCA, Maroc – L’Organisation mondiale de la santé (OMS), appuyée par ONU-Femmes et ONU-Droits de l’homme, a lancé le 17 octobre un appel mondial à l’interdiction des tests de virginité, aussi appelés « tests à deux doigts », pratiqué sur les femmes pour vérifier si leur hymen est intact.

Le rapport affirme que cette pratique est « médicalement inutile, douloureuse, humiliante et traumatisante ». Il relève par ailleurs que cette pratique, qui constitue une tradition de longue date dans plusieurs pays dont le Maroc, apparaît au sein de groupes d’immigrés résidant dans des pays développés, là où elle n’avait encore jamais été documentée.

Interrogé le 14 décembre au sujet de cet appel mondial par l’agence espagnole EFE, le porte-parole du gouvernement marocain, Mustafa Khalfi a répondu que ces tests « ne sont pas obligatoires » dans le pays. 

Délivré par un médecin généraliste ou un gynécologue, le certificat de virginité coûte le prix d’une consultation, c’est-à-dire entre 100 et 300 dirhams (entre 9 et 27 euros)

La représentante de l’OMS au Maroc, Maryam Bigdeli, a quant à elle reconnu à EFE que, près de deux mois plus tard, son agence n’avait pas abordé cette question avec les autorités sanitaires, reprenant l’argumentaire du gouvernement.

« Le recours à cette pratique n’est pas obligatoire certes, mais il est très courant », explique à Middle East Eye un gynécologue qui a préféré garder l’anonymat. « En effet, au Maroc, le certificat de virginité peut être réclamé par la famille du futur époux avant de procéder au mariage ». 

Délivré par un médecin généraliste ou un gynécologue, le certificat de virginité coûte le prix d’une consultation, c’est-à-dire entre 100 et 300 dirhams (entre 9 et 27 euros). Et cette pratique est autorisée par la loi puisque selon l’article 488 du code pénal, la défloration constitue également une circonstance aggravante dans tous les cas de viol et entraîne des peines de prison plus lourdes pour l’agresseur.

« Ma vulve m’appartient »

Or l’OMS rappelle que le but de l’examen effectué après une agression sexuelle est « d’évaluer l’ampleur des blessures et de voir si la victime a contracté des infections sexuellement transmissibles, non pas de contrôler le ‘’statut de virginité’’ ». 

L’organisation rappelle à ce titre que le mot virginité n’est pas un terme médical mais « une notion qui reflète la discrimination dont les femmes et les filles font l’objet ».

C’est pourquoi, dans un communiqué publié le 10 décembre à l’occasion de la journée des droits de l’homme, le Mouvement alternatif pour les libertés individuelles (MALI) a lancé la campagne « Ma vulve m’appartient ». Selon eux, ce test est une violence « sexiste et sexuelle » qui constitue « une atteinte aux droits fondamentaux des femmes et une violation de leur dignité et de leur liberté ».

D’autant plus que, selon les rédacteurs du rapport, cette pratique serait médicalement dangereuse. Il peut notamment endommager l’appareil génital et provoquer des saignements et des infections. Sans parler de la violence psychologique qu’il peut engendrer. 

« C’est un test simple mais violent : le médecin sépare les jambes de la femme et lui presse le vagin. C’est une grande violence lorsque la jeune fille n’a pas d’expérience sexuelle », rappelle Soumaya Naâmane Guessous, membre de l’Association marocaine de sexologie à l’agence EFE. 

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