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Le Premier ministre turc met en garde contre « l’esprit de vengeance » après le coup d’État

Les commentaires de Yıldırım surviennent au lendemain des déclarations d’Erdoğan selon lesquelles les députés turcs devraient discuter du rétablissement de la peine de mort tandis que se font entendre des appels demandant l’exécution des comploteurs
Les partisans d’Erdoğan agitent des drapeaux turcs lors d’un rassemblement sur la place Taksim à Istanbul, lundi (AFP)

Ce mardi, le Premier ministre turc Binali Yıldırım a mis en garde contre la vengeance et la vindicte populaire à la suite d’un coup d’État manqué visant son gouvernement.

« Personne ne peut être dans un esprit de vengeance. Une telle chose est absolument inacceptable dans l’État de droit », a déclaré Yıldırım, se référant à des images semblant montrer des partisans du gouvernement attaquer physiquement de présumés supporters du putsch.

Il s’est cependant engagé à ce que toute personne ayant agi de manière contraire à la loi soit punie. « Aujourd’hui, nous avons besoin d’unité », a-t-il ajouté, s’exprimant à l’issue d’une rencontre avec Kemal Kılıçdaroğlu, chef du Parti républicain du peuple (CHP), principal parti d’opposition.

La Turquie a emprisonné plus d’une vingtaine de généraux, dont un ancien chef de l’armée de l’air, ainsi que deux pilotes qui auraient abattu un avion de chasse russe en novembre, soupçonnés d’avoir planifié la tentative visant à renverser le président Recep Tayyip Erdoğan vendredi.

Lundi soir, Erdoğan a déclaré à CNN International qu’il approuverait toute décision prise par le Parlement concernant le rétablissement de la peine de mort alors que se multiplient les appels demandant des exécutions des putschistes.

« Le Parlement doit en discuter et si les leaders sont d’accord et en discutent alors moi, en tant que président, j’approuverai toute décision prise par le Parlement », a-t-il déclaré.

« Pourquoi devrais-je les garder et les nourrir en prison, pour les années à venir ? Voilà ce que les gens se demandent. »

Devlet Bahçeli, chef de file du Parti d’action nationaliste (MHP), d’extrême-droite, a également exprimé son soutien au rétablissement de la peine de mort, qui est une revendication de longue date de son parti.

« Les partisans gülenistes du coup d’État qui prennent leurs ordres de l’imam en Pennsylvanie [Fethullah Gülen] ne sont pas différents des organisations terroristes que sont Daech et le PKK » a-t-il estimé, se référant au groupe État islamique (EI) et au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), deux groupes qui ont perpétré des attentats en Turquie.

« Notre parti n’a jamais soutenu de coup d’État et a toujours pris le parti de la démocratie. »

Des informations ayant émergé dans la foulée du complot indiquent que 40 soldats appuyés par trois hélicoptères avaient l’intention de tuer ou de capturer le président, qui était en vacances dans la station balnéaire de Marmaris, une ville du sud-ouest de la Turquie.

« Si j’étais resté dix, quinze minutes de plus, j’aurais été tué ou j’aurais été capturé », a déclaré Erdoğan à CNN.

Une longue liste, exclusivité de Middle East Eye, référençant les officiers militaires et fonctionnaires qui devaient prendre le relais des postes vitaux une fois le coup terminé, suggère que le complot a été planifié bien à l’avance.

Les représentants du gouvernement ont indiqué qu’ils feront une annonce importante mercredi, mais n’ont pas développé davantage.

Plus de 200 personnes ont été tuées et plus de 1 400 blessées vendredi et samedi dans les violences qui ont suivi la tentative d’une faction de l’armée turque visant à prendre le contrôle du pays. La plupart des victimes sont des civils.

Le gouvernement turc a tenu pour responsable de la tentative de coup d’État les partisans au sein de l’armée du religieux vivant aux États-Unis Fethullah Gülen, un allié devenu ennemi du président Erdoğan, qui habite actuellement en Pennsylvanie.

Les représentants du gouvernement ont appelé les États-Unis à extrader Gülen en Turquie où il serait jugé pour avoir orchestré le complot – une allégation que Gülen a fermement démenti.

Bien que les États-Unis aient publiquement condamné la tentative de coup d’État, Washington a déclaré qu’il n’extradera pas Gülen à moins que le gouvernement turc ne puisse fournir la preuve de son implication.

Erdoğan a déclaré à CNN lundi que la Turquie allait déposer une demande d’extradition cette semaine, tandis que le Premier ministre turc a déclaré au Parlement que les dossiers de preuve contre Gülen seraient joints à la demande. Yıldırım avait déclaré plus tôt que la Turquie refuserait de présenter des preuves de la culpabilité de Gülen.

« Nous serions déçus que nos amis [américains] nous demandent de présenter des preuves, alors même que les membres de l’organisation d’assassins cherchent à faire tomber un gouvernement élu, sous la direction de cette personne », a déclaré Yıldırım.

« À ce stade, notre amitié pourrait même en souffrir », avait-t-il ajouté.

Cependant, ce mardi, Yıldırım a annoncé au Parlement qu’il avait en fait envoyé « quatre dossiers aux États-Unis » avec des preuves concernant Gülen.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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