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Les troupes turques traversent la Syrie pour affronter l’État islamique

Les combattants de l'État islamique fuient al-Raei après que la Turquie ait envoyé des troupes, des chars et des avions à travers la frontière après le meurtre d’un de ces soldats
Les véhicules de l'armée turque avancent sur un chemin de terre avec la ville syrienne de Kobané en arrière-plan le 26 juin 2015 à Suruç, en Turquie (AFP)

Les combattants de l’État islamique (Daech) fuient al-Raei, au nord-ouest de la province d'Alep, après que les troupes turques aient traversé la frontière syrienne pour les combattre sur place, selon ce que le correspondant de Middle East Eye Ibrahim Khader a rapporté jeudi.

Les militants de l’État islamique se seraient déplacés vers le village syrien à proximité d'al-Ayasha, également à la frontière turque, a ajouté Ibrahim Khader.

Les troupes turques ont réagi à une attaque de Daech contre eux dans la région frontalière turque de Kilis, qui a conduit à la mort d'un officier et a laissé un soldat grièvement blessé, a rapporté Ibrahim Khader.

« Nous pouvons confirmer que des coups de feu provenant des combattants de l’État islamique ont été tirés à partir d’un territoire de la Syrie près de la frontière turque et qu’un soldat est mort pendant l'échange tandis que plusieurs autres ont été blessés », a déclaré un fonctionnaire du gouvernement turc à MEE sous condition d'anonymat. 

« Les soldats ont riposté selon nos règles d'engagement, si quelqu'un tire sur les troupes turques, elles ripostent. Il est encore trop tôt pour dire si il y aura plus d'action sur le terrain », a-t-il ajouté.

Les tanks turcs de la cinquième brigade blindée ont ouvert le feu sur des cibles à l'intérieur de la Syrie, a rapporté l'AFP, citant la chaîne de télévision NTV.

La Turquie a également envoyé des avions de combat à la frontière syrienne après des affrontements avec l’État islamique, a déclaré un responsable turc à Reuters.

Les forces de sécurité turques ont également tiré sur des positions de Daech dans la ville d’Azaz au nord de la Syrie, tout en envoyant des véhicules blindés pour la région frontalière, a rapporté AA.

Al-Raei, qui comprend également un village du même nom, a une population en majorité turkmène.

Ibrahim Kadher rapporte aussi que l’État islamique appelle à l'appui des combattants à proximité, les exhortant sur les médias sociaux à se rendre sur la zone où les troupes turques sont présentes.

Les renforts sont déjà visibles près d’Ayyasha, où les militants semblent s’être regroupés, auraient dit des sources locales à Ibrahim Khader.

L'armée turque continue de tirer sur les positions de l’État islamique à Ayyasha, elle doit déloger les combattants et les chasser progressivement, a rapporté le site de soulèvement pro-syrien Eldorar Eshamiya.

« Trois véhicules appartenant à des terroristes de Daech se sont fait tiré dessus et ont été lourdement endommagées » a expliqué l'armée turque, notant qu’un combattant de l’État islamique avait été tué.

Selon des rapports non confirmés, la Turquie aurait créé une petite « zone de sécurité » le long de la frontière syrienne, et aurait autorisé les États-Unis à accéder à la base aérienne d'Incirlik.

L'Agence Anadolu a révélé que l'officier tué s’appelait Yalcin Nane, et les deux sergents blessés Fatih Kurt et Necef Cakmaktepe.

« Malheureusement, l'un de nos sous-officier [Yalcin Nane] a été tué et deux sergents blessés », le gouverneur Kilis Suleyman Tapsiz a rapporté à AA.

Les sergents blessés ont été pris en charge à l'hôpital public Kilis et sont dans un état stable, a-t-il ajouté.

La politique des partis

Pendant ce temps, le Parti républicain du peuple (CHP) et le Parti populaire pro-kurdes démocratique (HDP) - deux des trois principaux partis d'opposition de la Turquie - ont appelé à une enquête parlementaire sur la situation de sécurité.

Quelques heures à peine après leur appel à une enquête, un tribunal turc a émis une ordonnance de secret couvrant l'attentat suicide de lundi à Suruç qui a tué 32 personnes et blessé une centaine d’autres.

Le tribunal a déclaré que cet ordre a été émis au motif qu’un processus ouvert pourrait « mettre en danger le but de l'enquête ».

Le vice-Premier ministre de la Turquie, Numan Kurtulmus, a appelé les trois partis d'opposition au parlement à se joindre au parti de la Justice et du Développement (AKP) pour « s’élever ensemble contre le terrorisme au travers d’une déclaration commune ».

L’AKP de Turquie a récemment perdu sa majorité au Parlement pour la première fois depuis 2002, et le pays devrait convoquer de nouvelles élections si un gouvernement de coalition ne se forme pas.

L'AKP est « conscient de sa responsabilité de ne pas laisser la Turquie sans gouvernement. Cela prouve la maturité politique du parti et les gens ont vu que la Turquie est une démocratie forte », a déclaré Kurtulmus.

De nouvelles mesures de sécurité aux frontières

La Turquie partage une frontière de 900 kilomètres avec la Syrie et accueille près de deux millions de réfugiés syriens.

Elle compte environ 20 000 soldats stationnés le long de la frontière syrienne, ce qui représente la moitié du nombre total de soldats chargés de protéger les frontières de la Turquie dans son ensemble.

Ankara a récemment envoyé d'autres véhicules blindés et drones à ses unités frontalières postées à cet endroit.

Le cabinet turc a semble-t-il discuté mardi soir d’un certain nombre de nouvelles mesures pour améliorer la sécurité à la frontière syrienne, qui comprennent la construction d'un mur de béton.

Les mesures ont été rapportées suite à une vague de violentes attaques dans les zones turques le long de la frontière syrienne.

Lundi, un attentat suicide a tué 32 personnes dans la ville turque à majorité kurde de Suruç.

L'attaque semblait être l’œuvre de Daech mais les militants pro-kurdes ont cherché à blâmer Ankara, conduisant à l’assassinat par l’aile militaire du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) de deux policiers turcs mercredi.

Le PKK - désigné comme une organisation terroriste par la Turquie, l'Union européenne, les États-Unis et d'autres pays, y compris l'Iran - a décrit cette attaque comme une « vengeance » suite au  bombardement de Suruç.

Mercredi soir, une explosion a visé le siège de l'AKP dans la ville d'Iskenderun, à quelque 40 kilomètres de la frontière de la Turquie avec la Syrie, sans faire de blessés.

Toutefois jeudi, un troisième policier aurait été abattu dans la ville de Diyarbakir.

Traduit de l’anglais (original) par Margaux Pastor.

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