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« Nous ne sommes pas des terroristes » : à Derna, l'Égypte pourchasse un ennemi imaginaire

Alors que Le Caire affirme que son bombardement de la ville vise les responsables du récent massacre de coptes égyptiens, revendiqué par l’EI, les habitants de la ville libyenne rappellent qu’ils ont expulsé les combattants du groupe il y a plus de deux ans

La ville libyenne de Derna, assiégée par les forces fidèles au général rebelle Khalifa Haftar, fait face depuis vendredi à des bombardements intenses de l’armée de l’air égyptienne en représailles à une attaque survenue au sud du Caire vendredi dernier contre des chrétiens coptes, qui a fait 29 morts et a été revendiquée par le groupe État islamique (EI).

Cependant, un habitant de Derna a déclaré à Middle East Eye que les Égyptiens chassaient un ennemi imaginaire, l’EI ayant été expulsé de la ville il y a plus de deux ans.

Hamza al-Dernawy a décrit à Middle East Eye une ville isolée par le siège, des magasins bientôt à court de nourriture et de médicaments, et une population soumise à une campagne de bombardement croissante menée par les alliés égyptiens de Haftar.

« Nous ne sommes pas des terroristes, nous n'appelons pas à la guerre. Nous nous sommes débarrassés de l'État islamique en seulement huit mois »

- Hamza al-Dernawy, habitant de Derna

L'Égypte a débuté sa campagne de bombardements aériens sur la ville vendredi dernier, affirmant que celle-ci abritait des combattants extrémistes responsables du massacre des pèlerins coptes quelques heures auparavant. Les frappes aériennes, soutenues par des membres de l'Armée nationale libyenne de Haftar, se sont poursuivies jusqu'à lundi.

« Derna est assiégé par les milices de Haftar », a témoigné Hamza al-Dernawy. « Quiconque tente de partir est soit kidnappé, soit humilié par les soldats. »

« Nous sommes désormais habitués aux frappes aériennes – par les Libyens, par les Égyptiens. Les bâtiments ont été détruits, les voitures, les maisons. »

Il a nié les accusations de l'Égypte et de Haftar selon lesquelles la ville serait un foyer de « terroristes ».

« Nous ne sommes pas des terroristes, nous n'appelons pas à la guerre. Nous nous sommes débarrassés de l'État islamique en seulement huit mois. »

La ville est sous le contrôle du Conseil de la Choura de Derna depuis 2015, après avoir expulsé les membres de l'État islamique qui avaient tenté d’en prendre le contrôle.

Cependant, les forces fidèles à Haftar, dont le bastion se trouve à Benghazi, se battent depuis des années pour s’emparer de Derna, alléguant que le Conseil de la Choura est également une organisation « terroriste ».

Traduction : « Alors, pourquoi Sissi a-t-il bombardé Derna ? Quelqu'un devrait lui dire que l’EI n’y est plus ».

Dernawy a déclaré à MEE que les forces de Haftar empêchaient l’accès des fournitures médicales à la population. « C'est la chose la plus importante. Les femmes et les enfants ont besoin de médicaments, nous manquons de nourriture. »

« Les prix ont grimpé en flèche en raison du siège, a-t-il poursuivi, nous n'avons pas de gaz pour la cuisine. Parfois, ils en laissent entrer pendant un mois, puis le mois suivant ils arrêtent, ça dépend. »

« À Derna, nous n'avons pas d'enlèvements, pas d'assassinats, pas de cadavres jonchant les rues. Notre ville était un lieu sûr au moins. »

Hamza al-Dernawy a affirmé que de nombreuses zones civiles avaient été frappées par les bombardements égyptiens, dont Hay al-Zintaan, un quartier résidentiel.

Troisième vague d’attaques

Une troisième vague d'attaques aériennes sur Derna a eu lieu ce lundi, suite à des frappes vendredi et samedi effectuées par les forces égyptiennes et leurs alliés fidèles à Haftar.

Selon des sources militaires égyptiennes, les avions de l'armée de l'air du pays ont effectué six frappes dirigées contre des camps de combattants près de Derna.

Le Conseil de la Choura de Derna a publié un communiqué indiquant que ces frappes avaient ciblé des installations civiles plutôt que militaires, et que les allégations selon lesquelles des habitants de la ville étaient responsables de l’attaque contre les coptes étaient sans fondement.

Le conseil a ajouté que les frappes aériennes égyptiennes constituaient des « crimes de guerre » et qu’elles n'avaient rien à voir avec l’attaque survenue près du Caire vendredi.

Traduit de l’anglais (original).

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