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France : la polémique enfle autour d’Aya Nakamura, pressentie pour chanter Édith Piaf aux JO 2024

Le souhait d’Emmanuel Macron d’entendre chanter l’artiste franco-malienne lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques en juillet a déclenché l’hostilité de l’extrême droite, à laquelle répondent des artistes et des politiques de gauche
La chanteuse francophone la plus écoutée dans le monde est suivie par près de 1,3 million de personnes sur X et près de 4 millions sur Instagram (AFP/Joël Saget)
La chanteuse francophone la plus écoutée au monde est suivie par près de 1,3 million de personnes sur X et près de 4 millions sur Instagram (AFP/Joël Saget)
Par MEE

L’extrême droite s’est trouvé une nouvelle ennemie : l’artiste franco-malienne Aya Nakamura, 28 ans, également égérie internationale de Lancôme.

Reçue en février à l’Élysée par Emmanuel Macron, l’artiste R’n’B aurait été incitée par le président français à reprendre Édith Piaf lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques 2024 à Paris, prévue le 26 juillet devant 300 000 spectateurs. La fête, imaginée par l’acteur et metteur en scène Thomas Jolly, veut retranscrire « l’universalisme des valeurs françaises ».

Cette perspective a déclenché un torrent de réactions enthousiastes de la part des fans de l’artiste, sacrée « artiste féminine » aux Victoire de la musique 2024 en février et dont le quatrième album, DNK, est sorti en janvier 2023.

Mais ses détracteurs se sont aussi enflammés. Parmi eux, les Natifs, des activistes d’ultradroite réunis pour former un nouveau groupuscule après la dissolution de Génération identitaire en mars 2021.

Samedi 9 mars, les militants ont exposé sur les bords de la Seine une banderole sur laquelle était inscrit : « Y’a pas moyen Aya, ici c’est Paris, pas le marché de Bamako », en référence aux paroles du plus grand tube de la chanteuse, « Djadja », qui cumule 950 millions de vues sur YouTube.

Le lendemain, lors du premier grand meeting de campagne pour les élections européennes du parti Reconquête! (extrême droite) à Paris, son président Éric Zemmour a déclenché des huées à l’encontre de la chanteuse lorsqu’il a dit que les fœtus aimaient Mozart et pas Aya Nakamura.

La chanteuse francophone la plus écoutée au monde, suivie par près de 1,3 million de personnes sur X et près de 4 millions sur Instagram, a vivement réagi sur les réseaux sociaux, en accusant ses détracteurs d’être « racistes ».

Les fautes d’orthographe dans son tweet lui ont valu une nouvelle salve de moqueries, de la part d’Éric Zemmour et des Natifs. Ces derniers ont publié ce lundi 11 mars un communiqué dénonçant le choix d’Aya Nakamura pour la cérémonie des JO comme un « choix très politique et complètement démagogique ».

« Macron vise à imposer Aya Nakamoura comme la chanteuse représentant les Français et leur culture. Visiblement, le gouvernement est encore bloqué sur la propagande ‘’black-blanc-beur’’ de la Coupe du monde de football 1998 », écrivent-ils.

Selon un sondage Odoxa Winamax RTL publié le 10 mars, 63 % des Français interrogés estiment que le choix de la star pour les JO est une « mauvaise idée ».

Les Français qui la connaissent n’aiment pas ses chansons (73 %) et estiment qu’elle ne représente ni la musique française (73 %) ni la jeunesse (60 %). Les personnes interrogées auraient préféré voir Goldman (26 %), Vianney ( 20 %), voire Soprano (16 %) chanter à la cérémonie d’ouverture.

Les attaques contre la chanteuse, qui a fait la une de Forbes en juillet 2021, ont suscité de nombreux témoignages de soutien de la part de personnalités médiatiques y compris politiques, comme Sandrine Rousseau, députée de La France insoumise (LFI, gauche radicale).

Dadju, l’un des poids lourds du R’n’B en France, a aussi pris la défense d’Aya Nakamura : « C’est pour ca qu’on est en retard ici. Vous lynchez la plus grosse artiste du pays avec des arguments de CM1. »

La ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, a également apporté son soutien à la chanteuse.

« Ils prétendent aimer leur pays mais ils veulent en exclure la chanteuse francophone la plus écoutée dans le monde depuis Édith Piaf. On ne peut pas être raciste et patriote en France », a fustigé de son côté le député LFI Antoine Léaument.

Les attaques de l’extrême droite seront-elles contre-productives ? « C’est une polémique partie d’une France rance mais ce n’est pas eux qui vont décider. J’espère qu’elle va chanter aux JO, ça devient impérieux », affirme à l’AFP Carole Boinet, directrice de la rédaction du magazine culturel français Les Inrockuptibles.

« C’est impardonnable que des racistes puissent s’en prendre à une artiste pour ses origines et sa couleur de peau, alors que les JO transcendent les frontières », affirme de son côté à l’AFP Angelo Gopee, patron de Live Nation France, antenne nationale de l’un des plus gros producteurs de spectacles au monde.

« C’est pas un tweet d’une ministre qu’il faut, tous les politiques devraient être vent debout », souligne-t-il.

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