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Comme la « Nakba » : attaque meurtrière de colons en Cisjordanie occupée après la mort de deux Israéliens

Au moins un Palestinien a été tué et une centaine d’autres blessés lorsque des colons ont attaqué et incendié des maisons de la ville de Huwara alors que leurs habitants étaient encore à l’intérieur
Une photo partagée sur Twitter de la ville de Huwara, dans le nord de la Cisjordanie, lors d’une attaque organisée par des colons après le meurtre de deux Israéliens quelques heures plus tôt (Twitter)

Des colons israéliens ont incendié de grandes parties de la ville de Huwara, dans le nord de la Cisjordanie occupée, dimanche soir, après qu’un Palestinien a tué deux Israéliens quelques heures plus tôt.

Au moins un Palestinien, identifié comme Sameh Hamdullah Mahmoud Aktech, a été tué lors de l’attaque, selon le ministère palestinien de la Santé. Il a reçu plusieurs balles dans l’abdomen.

Des maisons, magasins, voitures et terres agricoles ont été incendiés dans celle ville située juste à la sortie de Naplouse. Ses habitants accusent les forces d’occupation israéliennes d’avoir accordé aux colons un libre accès à la ville.

Selon Ghassan Daghlas, un militant palestinien qui surveille l’expansion des colonies israéliennes dans le nord de la Cisjordanie, à 21 h 15 (heure locale), plus de 30 maisons et 15 voitures avaient été détruites, en plus d’un magasin incendié.

« Ce que font les colons ce soir, ce sont des crimes de guerre similaires aux événements de la Nakba et aux attaques des gangs sionistes », témoigne Daghlas à Middle East Eye, en référence à la « catastrophe » de 1948 qui a conduit à la création de l’État d’Israël.

Neuf familles palestiniennes ont dû être secourues de leurs maisons en flammes, selon la chaîne israélienne Channel 12 news.

« Nos vies sont en danger »

Un habitant de Huwara, Ziyad Dmaidi, raconte à MEE qu’il a juste eu le temps de mettre sa famille en sécurité avant que sa maison ne soit incendiée.

Dmaidi rentrait du travail lorsqu’il a vu un groupe de colons se diriger vers chez lui, dit-il, décrivant le sentiment de panique qui l’a assailli alors qu’il se précipitait à l’intérieur pour porter secours à ses proches.

En quelques minutes, « des dizaines de colons » ont commencé à briser les fenêtres, pénétrant par effraction dans la maison. La famille s’est échappée juste au moment où des pneus en caoutchouc enflammés étaient jetés à l’intérieur. Son domicile a été entièrement détruit.

« Pas un seul moment n’ai-je pensé à la maison ou à toutes nos affaires, je ne pensais qu’à mes enfants et comment les sauver de ce cauchemar », déclare-t-il.

« Mes enfants se sont mis à pleurer et j’ai essayé de les calmer, mais les bruits des attaques étaient plus forts que tout : jurons en hébreu, bris de vitres, incendie de véhicules, de maisons et de magasins... C’était terrible »

- Fida Hamad, habitante de Huwara

« Nous sommes sortis de la maison et nous nous sommes mis en sécurité avec l’aide des ambulanciers qui ont également été attaqués alors qu’ils tentaient de nous évacuer. Nos vies sont en danger et tout ça pendant que les soldats israéliens restent là à attendre pour protéger uniquement les colons. »

Fida Hamad, une autre habitante de Huwara, indique à MEE que cette attaque est la plus importante qu’elle ait jamais connue et que des maisons ont été incendiées alors que leurs occupants étaient toujours à l’intérieur.

« Nous étions à la maison quand soudain, nous avons entendu des explosions et des cris de panique. Nous avons appris que les colons attaquaient la ville », témoigne-t-elle.

« Mes enfants se sont mis à pleurer et j’ai essayé de les calmer, mais les bruits des attaques étaient plus forts que tout : jurons en hébreu, bris de vitres, incendie de véhicules, de maisons et de magasins... C’était terrible. »

Le Croissant-Rouge palestinien a confirmé qu’au moins 100 personnes avaient été blessées lors de l’attaque. Un Palestinien a été grièvement blessé à la tête après avoir été touché par des pierres, selon Haaretz.

Dans un communiqué, le Premier ministre palestinien Mohammad Shtayyeh a accusé le gouvernement israélien de l’entière responsabilité de l’attaque à Huwara et exhorté la communauté internationale à assurer la protection de la population civile.

La membre palestinienne de la Knesset israélienne Aida Touma-Suleiman a également condamné les attaques, tweetant : « Les colons commettent un crime horrible ce soir à Huwara – incendier des maisons alors que les familles sont à l’intérieur et faire des ravages. »

« Ils agissent dans l’esprit du gouvernement fasciste », a déclaré Touma-Suleiman. « J’ai parlé à plusieurs ambassadeurs et je leur ai demandé d’intervenir ».

Au moins un camion de pompiers palestinien qui tentait de répondre aux incendies a été attaqué, ses vitres brisées. Plusieurs ambulances ont aussi été endommagées selon des informations relayées sur Twitter.

Les colons « cherchent à se venger »

Plus tôt dimanche, Hillel et Yagel Yaniv, deux frères de Har Bracha, une colonie illégale de Cisjordanie occupée, ont été tués par balle dans leur voiture alors qu’ils traversaient Huwara.

L’agresseur a percuté leur véhicule, avant de tirer sur les deux hommes et de s’enfuir. L’armée israélienne a déclaré être à la recherche de l’auteur.

Cette attaque faisait suite à un raid de l’armée israélienne mercredi à Naplouse, qui a coûté la vie à onze Palestiniens et blessé une centaine d’autres – l’incursion la plus meurtrière en Cisjordanie depuis la fin de la seconde Intifada en 2005.

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Après la mort des deux Israéliens dimanche, des colons ont lancé des appels pour organiser une marche vers Huwara sur les réseaux sociaux afin de « chercher à se venger ».

La Cisjordanie occupée abrite environ 2,9 millions de Palestiniens ainsi que quelque 475 000 colons juifs qui vivent dans des colonies approuvées par l’État israélien bien que considérées comme illégales au regard du droit international.

Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a publié une déclaration conjointe après le meurtre des deux Israéliens dimanche, pour annoncer que la Knesset avait adopté une loi approuvant la peine de mort pour les Palestiniens reconnus coupables d’infractions terroristes contre des Israéliens.

« En ce jour difficile où deux citoyens israéliens ont été assassinés dans une attaque terroriste palestinienne, il n’y a rien de plus symbolique que d’adopter une loi sur la peine de mort pour les terroristes », indique le communiqué.

Pendant ce temps, les dirigeants israéliens et palestiniens ont entamé des pourparlers en Jordanie pour tenter de garantir le calme en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

Depuis le début de l’année, au moins 62 Palestiniens ont été tués par des Israéliens, soit plus d’un mort par jour.

La violence a connu une forte augmentation en 2022, année durant laquelle au moins 167 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, le bilan le plus élevé dans ces territoires en une seule année depuis la deuxième Intifada.

Traduit de l’anglais (original).

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