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Guerre à Gaza : le calvaire de deux enfants palestiniens détenus par les forces israéliennes

Une fillette de 10 ans et son petit frère de 6 ans ont été détenus dans le soi-disant « couloir de sécurité » mis en place par Israël. Ils ont été interrogés à propos du Hamas 
Des enfants jouent sur le toit d’un bâtiment à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 21 décembre 2023 (Mohammed Abed/AFP)
Des enfants jouent sur le toit d’un bâtiment à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 21 décembre 2023 (Mohammed Abed/AFP)
Par Aseel Mousa à GAZA, Palestine occupée

« Ils nous ont posé des questions bizarres à propos du Hamas et de l’endroit où se trouvaient les prisonniers israéliens. Je leur ai dit que je n’avais pas d’information. » Dana, une fillette gazaouie de 10 ans, raconte à Middle East Eye avoir été interrogée par des soldats israéliens en novembre.

Avec leur mère, Sarah, et son petit frère Ammar, 6 ans, ils ont fui vers le sud de Gaza dans le « couloir de sécurité » désigné par Israël au mois de novembre, un couloir devant permettre aux Palestiniens de la bande de Gaza de fuir vers le sud pour échapper aux bombardements

Cette image satellite fournie par Maxar Technologies montre des gens attendant du gaz le long de la route de Salah al-Din, dans la bande de Gaza, le 26 novembre 2023 (AFP)
Cette image satellite fournie par Maxar Technologies montre des gens attendant du gaz le long de la route de Salah al-Din, dans la bande de Gaza, le 26 novembre 2023 (AFP)

Tous deux marchaient le long de la route Salah al-Din, principal axe de circulation nord-sud de la bande de Gaza, avec leur mère et Karim, un ami de leur père Mohammed. C’est alors que des soldats ont tiré en l’air à deux reprises et ont ordonné à tout le monde de se coucher au sol. 

« Le jeune homme avec un chapeau noir et un t-shirt blanc, viens », a ordonné l’un des soldats, désignant ainsi Karim, selon Mohammed.

Le père de Dana et Ammar se trouvait dans le sud de Gaza à ce moment-là, attendant anxieusement de retrouver sa femme et ses enfants. Celui-ci relate le calvaire de ses enfants à MEE, ne donnant que les prénoms pour des raisons de sécurité.

« Les soldats d’occupation ont tabassé Karim et l’ont détenu pendant douze heures, l’insultant et l’interrogeant, allant même jusqu’à le déshabiller », poursuit Mohammed. 

Pendant ce temps, Dana et Ammar ont été séparés de leur mère et placés dans un véhicule militaire. 

« J’étais terrifiée et Ammar pleurait énormément », rapporte Dana à MEE.

Après une heure de trajet, ils sont arrivés dans un endroit secret, où ils ont été placés avec d’autres enfants dans un container.  « J’étais choquée de voir d’autres enfants, y compris en bas âge. Tous les enfants étaient terrifiés », ajoute-t-elle. 

« Des questions sur ma mère et mon père »

« Il y avait six grands écrans de très haute qualité, et ils me posaient sans cesse des questions sur ma mère et mon père. Ils m’ont demandé de regarder une vidéo enregistrée lorsqu’on a fui et m’ont demandé de montrer ma mère. Je ne sais pas pourquoi ils m’ont demandé de faire cela. »

« Ce qui m’a fait le plus de mal et qui a brisé mon cœur, c’était la peur et les pleurs de Ammar. »

Sur la route Salah al-Din, Sarah était sous le choc. « J’étais à deux doigts de perdre la tête. Je ne savais pas comment réagir », indique la mère des enfants à MEE. « C’était comme si mon âme me quittait. »

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Lorsque Mohammed a appris ce qui était arrivé, il a immédiatement téléphoné au Comité international de la Croix-Rouge, pour demander de l’aide. 

Ce père de huit enfants avait été contraint, plus tôt, de se diriger vers le sud de Gaza. Originaire du nord de la bande de Gaza, la famille s’est réfugiée auprès de l’Atfaluna Society for Deaf Children, une ONG, dans la ville de Gaza aux premiers jours de l’offensive israélienne. 

Mais après des semaines passées dans des conditions misérables, avec peu d’eau et de nourriture, la famille de sa sœur a décidé de fuir vers le sud. Mohammed les a accompagnés vers le « couloir de sécurité » avec l’intention de retourner auprès de sa famille après. Mais un soldat l’a repéré sur la route et il a été contraint de se diriger vers le sud sous la menace des armes, explique-t-il. 

Depuis son refuge à Deir al-Balah, il a fait en sorte que sa femme et ses deux jeunes enfants le rejoignent. Après 27 heures à courir après la Croix-Rouge, on l’a finalement prévenu que Dana et Ammar seraient libérés et retrouveraient leurs parents. 

« [Leur arrestation] a été la chose la plus dure à laquelle leur mère et moi avons jamais été confrontée », affirme-t-il à MEE

Le soi-disant « couloir de sécurité », établi par les troupes israéliennes à Gaza en octobre, est utilisé par les Palestiniens contraints de quitter les nord pour le sud de la bande de Gaza.

Mais les dizaines de témoins et d’organisations de défense des droits de l’homme affirment que ce corridor est tout sauf sécurisé, accusant les forces israéliennes de l’utiliser pour tuer, détenir et maltraiter les Palestiniens. 

Des centaines de Palestiniens ont été détenus alors qu’ils entreprenaient le voyage depuis le début de la guerre, y compris des médecins, des femmes et des enfants.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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