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Civils palestiniens bombardés par Israël : sermonné par Netanyahou, Macron reprend ses propos

Quelques heures après avoir exhorté Israël à cesser ses bombardement sur les civils de la bande de Gaza, le président français a rappelé le droit d’Israël à se défendre
Le président français a précisé à la présidence israélienne que ses commentaires à la BBC « concernaient la situation humanitaire, qui reste une question importante pour lui et pour de nombreux pays » (capture d’écran)
Emmanuel Macron a précisé à la présidence israélienne que ses commentaires à la BBC « concernaient la situation humanitaire, qui reste une question importante pour lui et pour de nombreux pays » (capture d’écran)
Par MEE

« Est-ce Netanyahou qui décide de la position de la France ? » Manuel Bompard, coordinateur de La France insoumise (LFI, gauche radicale), s’est interrogé mardi 13 novembre, sur X, sur la nouvelle polémique diplomatique France-Israël.

Tout a commencé par un entretien accordé samedi à la BBC, dans lequel le chef de l’État français, à propos du conflit israélo-palestinien, a exhorté Israël à cesser « les bombardements tuant des civils à Gaza ».

« Nous partageons la douleur [d’Israël]. Et nous partageons leur volonté de se débarrasser du terrorisme », a-t-il déclaré trois semaine après avoir proposé une coalition pour lutter contre le Hamas. Mais « de facto, aujourd’hui, des civils sont bombardés. Ces bébés, ces femmes, ces personnes âgées sont bombardés et tués », il n’y a « aucune justification » et « aucune légitimité à cela ».

Depuis le 7 octobre, au moins 11 180 personnes, essentiellement des civils incluant 4 609 enfants et 3 100 femmes, ont été tuées dans les bombardements israéliens sur la bande de Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas.

Cette « réaction dans la lutte contre le terrorisme, parce qu’elle est menée par une démocratie, doit être conforme aux règles internationales de la guerre et au droit international humanitaire », a insisté le président français qui a aussi relevé que « le bombardement massif » de Gaza crée « du ressentiment » dans la région.

« Trouble »

Ces propos ont d’abord été bien accueillis en France à gauche. Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français (PCF), s’est félicité sur LCI qu’« enfin la France verbalise sa demande d’un cessez-le-feu » à Gaza où « des milliers de civils palestiniens ont été massacrés dans une vengeance aveugle ».

Le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) a en revanche déclaré avoir pris connaissance « avec trouble » des propos du président de la République.

« En laissant penser qu’Israël porte la responsabilité des morts civiles, qui sont bien entendu toutes à déplorer, cette déclaration ouvre la voie à une récupération par ceux qui comme LFI attisent les tensions et divisent la France », a déclaré l’organisation dans un communiqué, en demandant « une clarification de la position de la France ».

Mais alors que Paris appelle depuis jeudi à « œuvrer à un cessez-le-feu », le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a sèchement répondu à Emmanuel Macron.

« Il a fait une erreur grave sur le plan factuel et sur le plan moral. Celui qui empêche l’évacuation des civils, ce n’est pas Israël, c’est le Hamas », a-t-il affirmé en conférence de presse. « La responsabilité des dommages causés aux civils ne doit pas être imputée à Israël, mais au Hamas. »

« Si nous offrons une immunité à ces organisations terroristes qui commettent un double crime, qui, d’abord, ciblent nos civils mais en plus se cachent derrière leur propre population civile, si nous leur offrons une immunité, nous garantissons que c’est quelque chose qui va se propager, je le dis au président français et à nos autres amis à travers le monde, cela arrivera jusqu’à vous », a-t-il menacé en concluant : « Nous n’avons pas besoin de ces leçons de morale. »

« Beaucoup de douleur »

Dimanche, la présidence israélienne a diffusé un communiqué pour annoncer que Macron avait contacté son homologue israélien Isaac Herzog afin de dire qu’il n’« accusait pas Israël de porter atteinte intentionnellement aux civils ».

La présidence israélienne a salué cet échange téléphonique qui a permis à Emmanuel Macron de « clarifier » ses propos, lesquels « ont causé beaucoup de douleur et de contrariété en Israël ». 

Le président français a précisé que ses commentaires à la BBC « concernaient la situation humanitaire, qui reste une question importante pour lui et pour de nombreux pays », a-t-elle ajouté. 

Selon la présidence israélienne, Emmanuel Macron a également « souligné qu’il soutenait sans équivoque le droit et le devoir d’Israël à se défendre et a exprimé son soutien à la guerre menée par Israël contre le Hamas ». 

« Le président a prononcé des paroles qui n’étaient pas pensables 48 heures plus tôt, et qui viennent rompre l’unanimisme pesant d’un Occident faisant bloc autour d’Israël depuis le choc du 7 octobre, mais coupé des émotions du reste du monde », a analysé l’éditorialiste Pierre Haski ce lundi sur France Inter, dans sa rubrique « Géopolitique ».

« La crainte d’Israël, et c’est ce qui explique cette sur-réaction, c’est que la France, en rompant les rangs occidentaux, n’entraîne d’autres pays dans sa critique des bombardements massifs. En tapant fort, Netanyahou pense, à juste titre, que les autres Occidentaux s’abstiendront. Au moins pour un temps. »

Selon Le Figaro, plusieurs ambassadeurs de France au Moyen-Orient et dans certains pays du Maghreb ont collectivement rédigé et signé une note dans laquelle ils regrettent le virage pro-israélien pris par Emmanuel Macron. Un diplomate, qui a souhaité garder l’anonymat et qui a lu la note, cité par le quotidien, explique que les ambassadeurs dissidents regrettent cette ligne « en rupture avec [la] position traditionnellement équilibrée entre Israéliens et Palestiniens ».

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