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Al Hoceima : le face-à-face dégénère entre des manifestants et les forces de l’ordre

Ces derniers jours, la tension était montée d'un cran à Al Hoceima, depuis sept mois l'épicentre d'un mouvement de contestation sociale devenue politique. Ce jeudi, des affrontements ont éclaté avant la tombée de la nuit entre des jeunes et des policiers
Un manifestant se prépare à tirer dans une cartouche de gaz lacrymogène pour la renvoyer sur les forces de l'ordre lors d'affrontements qui ont éclaté ce jeudi 8 juin à Al Hoceima, dans le Rif marocain (AFP)

Des affrontements ont éclaté jeudi en fin de journée entre manifestants et policiers dans la ville d'Al Hoceima, épicentre d'un mouvement de contestation populaire qui secoue depuis sept mois cette région dans le nord du Maroc. Selon un habitant contacté par Middle East Eye, plusieurs personnes ont été blessées mais il est difficile de savoir combien car « les jeunes ont peur de se rendre à l'hôpital ».

Des dizaines de jeunes ont affronté à coups de pierres et pendant plus d'une heure les forces anti-émeute, qui ont répliqué en faisant usage notamment de gaz lacrymogène dans les ruelles du quartier Sidi Abed, où selon le site Le Desk, il règne « une ambiance de couvre-feu ».

Des manifestations nocturnes quotidiennes se déroulaient depuis une douzaine de jours dans ce quartier, mais jusqu'à présent sans violence et après la rupture du jeûne du Ramadan.

Ce jeudi, vers 17h, des groupes de jeunes se sont rassemblés par surprise dans les ruelles pour manifester. Ils ont été repoussés sans ménagement par les policiers vers un carrefour du quartier, où plusieurs d'entre eux ont alors lancé des pierres sur les forces de l'ordre.

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Au moins deux personnes ont été blessées, un policier à la mâchoire par une pierre, et un manifestant à la tête par des coups de matraques, a constaté un journaliste de l'AFP. La police a procédé à plusieurs interpellations.

Les affrontements ont cessé vers 18h30, mais les protestataires ont promis de revenir manifester après la rupture du jeûne dans la soirée.

« Un groupe d'adolescents et de mineurs voulaient occuper la voie publique, il y a eu intervention des forces de l'ordre, tout est rentré dans l'ordre maintenant », a commenté à l'AFP une source au sein des autorités locales, qualifiant l'incident « d'escarmouche ».

Traduction : « Urgent – Photos : des Rifains violentés dans le quartier de Sidi Abed »

La quasi-totalité des meneurs du mouvement ont été arrêtés ces dix derniers jours, et font face à de graves accusations de « crimes », notamment « atteinte à la sécurité intérieure de l'État ».

Selon Mustapha el-Khalfi, porte-parole du gouvernement, 86 personnes sont aujourd’hui poursuivies par la justice. « Seize personnes ont été traduites devant la Cour d’appel d’Al Hoceima et 32 autres au tribunal de première instance de la ville », a-t-il précisé ce jeudi lors d’un point presse au terme de la réunion hebdomadaire du Conseil de gouvernement. Toujours selon les chiffres officiels, 31 personnes ont été placées en détention préventive et sept en garde à vue. »

À Al Hoceima, ainsi que dans la localité voisine d'Imzouren, les manifestations nocturnes sont désormais quotidiennes, malgré le quadrillage de la police. 

Des manifestants brandissent le portrait de Nasser Zefzafi, leader de la contestation du Rif, arrêté lundi 28 mai 2017 (AFP)

La situation y était plus tendue ces trois dernières nuits, alors que les policiers prenaient position au cœur de Sidi Abed pour empêcher les manifestants de s'y regrouper dans les rues. Ces derniers ne cessent d'affirmer le caractère « pacifique »de leur mouvement.

Des heurts avaient eu lieu les 26 et 27 mai, dans les jours précédant l'arrestation de Nasser Zefzafi, le leader du hirak ainsi que vendredi dernier à Imzouren, une localité voisine et autre haut-lieu de la contestation.

Depuis le début du mouvement fin octobre, déclenchée par la mort d'un vendeur de poisson broyé dans une benne à ordure, près de 850 sit-in et manifestations diverses se sont déroulées dans la province, selon les chiffres du ministère de l'Intérieur.

Vidéo de la manifestation ce jeudi soir (Facebook)

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