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Maroc : le PJD appelle à interdire un film traitant de l’homosexualité

Le parti conservateur s’insurge contre la projection du film Le Bleu du caftan en salle depuis début juin
Le film a remporté plusieurs prix à l’international, dont le Prix international des critiques du festival de Cannes (capture d’écran)
Le film a remporté plusieurs prix à l’international, dont le Prix international des critiques du festival de Cannes (capture d’écran)
Par MEE

Le Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste) a dénoncé la projection au Maroc du film Le Bleu du caftan, au nom d’« une transgression dangereuse des constantes religieuses et nationales et des valeurs morales et éducatives du peuple musulman marocain ».

Dans un communiqué publié le 16 juin, le parti appelle les autorités à « interdire la projection d’un film sur l’homosexualité […] conformément à la loi en vigueur » et invite « toutes les parties concernées à faire face aux tentatives actuelles de normalisation avec ce phénomène anormal ».

La loi marocaine a déjà servi de base, rappelle le PJD, pour censurer « un film homosexuel produit par la même partie, connue pour ses tendances hostiles aux constantes et aux sacralités de la patrie ».

Le PJD se réfère à Much Loved, du réalisateur Nabil Ayouch, interdit de projection au Maroc en 2015 par le gouvernement PJD de l’époque, au motif qu’il comporte un « outrage grave aux valeurs morales et à la femme marocaine et une atteinte flagrante à l’image du royaume ».

Much Loved s’attaque au phénomène de la prostitution au Maroc. Son actrice principale, Loubna Abidar, avait dû se réfugier en France après avoir été victime d'une agression présumée à Casablanca en novembre 2015.

« Discours électoraliste »

Réalisé par Maryam Touzani, Le Bleu du caftan aborde le sujet tabou de l’homosexualité. Halim est marié depuis longtemps à Mina, avec qui il tient un magasin traditionnel de caftans dans la médina de Salé, au Maroc.

Le couple vit depuis toujours avec le secret de Halim, son homosexualité qu’il a appris à taire. La maladie de Mina et l’arrivée d’un jeune apprenti vont bouleverser cet équilibre. Unis dans leur amour, chacun va aider l’autre à affronter ses peurs.

Le film a remporté plusieurs prix à l’international, dont le Prix international des critiques du Festival de Cannes.

Le Bleu du caftan : un autre regard sur le désir homosexuel au Maroc
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Depuis le 7 juin, le long-métrage est projeté dans des salles de cinéma, à Casablanca, Rabat et Tanger. Il est aussi distribué dans une trentaine de pays.

Des critiques de cinéma ont réagi dans les médias marocains à l’appel du PJD. Moulim Laâroussi, qui s’exprime sur le site Hespress, regrette « l’introduction du débat moral au cœur d’une question artistique », dénonçant un « discours électoraliste » de la part du PJD.

En 2022, les autorités marocaines avaient suspendu le visa d’exploitation du film Zanka Contact pour avoir utilisé dans sa bande son une musique d’une chanteuse sahraouie, Mariem Hassan, favorable à l’indépendance du Sahara occidental.

La même année, le Maroc avait également interdit le film britannique La Dame du Paradis qui raconte l’histoire de la fille du prophète Mohammed, Fatima Zahra, épouse d’Ali, cousin du prophète, considéré comme « blasphématoire » par plusieurs pays musulmans.

En 2021, le film de super-héros Les Éternels a été interdit de projection dans plusieurs pays du Golfe et en Égypte pour sa représentation d’un couple homosexuel.

En 2018, plusieurs pays du Moyen-Orient ont interdit le film des studios Disney et Pixar En Avant, en raison d’une référence mineure à une relation homosexuelle.

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