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France : l’OAS reste un marqueur pour l’ultradroite

L’ultradroite est moins active en France, mais la tentation violente affleure depuis les attentats de 2015
Photo datée des années soixante, prise dans le centre d’Alger d’un graffiti « La France reste » signé de l’OAS (AFP)
Par AFP

L’OAS, organisation armée clandestine des ultras de l’Algérie française, créée il y a 60 ans, joue encore un rôle en France dans la violence de l’ultradroite après l’indépendance de l’Algérie, jusqu’à inspirer des petits groupuscules radicaux démantelés récemment.

Beaucoup d’anciens combattants de l’OAS trouvent après l’indépendance algérienne refuge au parti Front national (FN), mais d’autres continuent le combat ou forment les auteurs d’attentats terroristes d’extrême droite dans les années 1970.

Le groupuscule nationaliste Jeune Nation (JN), fondé en 1949 par Pierre Sidos, fils d’un haut cadre de la milice, est interdit en 1958, et son successeur le Parti nationaliste dissous l’année suivante. 

Mais « dans les faits, le réseau reste actif et ses membres participent aux activités de l’OAS », rappelle l’historien Nicolas Lebourg, auteur d’une étude sur la radicalisation de l’extrême droite en France (Extreme-Right Terrorist Radicalization in France since November 13, 2015) pour la George Washington University, où il explique comment l’OAS reste un marqueur pour l’ultradroite.

Des néonazis formés par des ex-OAS

Selon des estimations d’historiens, l’OAS, qui regroupait environ un millier d’activistes, a tué en Algérie au moins 2 200 personnes dans près de 13 000 explosions au plastic, 2 546 attentats individuels et 510 attentats collectifs. En métropole, le nombre total de ses victimes est estimé à 71 morts et 394 blessés. 

L’OAS est créée le 11 février 1961 à Madrid, dans l’Espagne franquiste, face au souhait désormais manifeste du gouvernement français et du général Charles de Gaulle de se désengager en Algérie, scellé le mois précédent par un référendum sur l’autodétermination.

Ses initiateurs sont des activistes anti-indépendantistes proches de l’extrême droite, Pierre Lagaillarde et Jean-Jacques Susini, exilés à Madrid et rapidement rejoints par le général Raoul Salan.

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Pour la seule année 1961, département de la Seine (incluant Paris) exclu, les nationalistes français – OAS comprise – auraient été responsables de 404 attentats en métropole.

En novembre 1962, JN rompt avec l’OAS puis Pierre Sidos part fonder en 1968 l’Œuvre française, qui intégrera le FN dans les années 1990 jusqu’en 2011.

Mais la violence de l’ultradroite se poursuit dans les années 1970, notamment à Marseille (Sud-Est).

En 1973, après qu’un Algérien déséquilibré a égorgé un chauffeur de bus à Marseille, une vague de violences déferle : des Maghrébins sont tués à la hache, par balles, noyés (seize morts et autant de blessés).

Elle culmine dans le plasticage du consulat d’Algérie à Marseille, qui fait 4 morts et 23 blessés. « Les auteurs sont pour l’essentiel des anciens de l’OAS », affirme Nicolas Lebourg.

Pour les auteurs de l’attentat contre le consulat, il s’agit de répondre à la « colonisation algérienne de la France », selon leur tract de revendication.

Les poseurs de bombes néonazis de 50 attentats en 1979-80 sont, eux, formés par d’anciens commandos Delta, les escadrons de la mort de l’OAS.

En 1983, la CIA estime que depuis 1958, l’État français a combattu sur son sol 41 organisations terroristes, dont seize d’extrême droite, treize d’extrême gauche et douze séparatistes.

L’ultradroite est moins active dans les années 1990 même si la violence ressurgit épisodiquement, comme en 1995 à Marseille avec le meurtre d’Ibrahim Ali, 17 ans, par des colleurs d’affiches du FN.

Mais la tentation violente affleure depuis les attentats de 2015 à Paris (Charlie Hebdo, le Bataclan). Deux groupuscules, nommés OAS et AFO (Action des forces opérationnelles), démantelés en 2017 et 2018, assimilent le terrorisme se revendiquant de l’islam à la poursuite du conflit algérien.

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