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Pandora Papers au Moyen-Orient : quels sont les dirigeants impliqués ?

Le Premier ministre et le chef de la Banque centrale libanais, la sœur du roi du Maroc, le dirigeant de Dubaï, l’émir du Qatar et le roi de Jordanie apparaissent dans les nouvelles révélations sur les paradis fiscaux
Le dirigeant de Dubaï, le cheikh Mohammed ben Rachid al-Maktoum, et le roi Abdallah II de Jordanie sont tous deux mentionnés dans les Pandora Papers (AFP)
Le dirigeant de Dubaï, le cheikh Mohammed ben Rachid al-Maktoum, et le roi Abdallah II de Jordanie sont tous deux mentionnés dans les Pandora Papers (AFP)
Par MEE

Plus de 11,9 millions de fichiers confidentiels transmis au Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) révèlent les montages offshore de certains dirigeants du Moyen-Orient. 

Les Pandora Papers montrent comment les riches et les puissants créent des sociétés dans des juridictions opaques afin de dissimuler leurs actifs.

Ils constituent la plus grande fuite de documents liés aux paradis fiscaux de l’histoire : ces documents financiers et juridiques exposent ce que l’ICIJ qualifie de « système permettant le crime, la corruption et les malversations, le tout dissimulé par des sociétés offshore opaques ».

Si créer des sociétés offshore dans des territoires tels que les îles Vierges britanniques ou le Panama n’est pas forcément illégal, c’est un outil utilisé fréquemment pour l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent et d’autres pratiques financières opaques. 

Le roi de Jordanie, l’émir du Qatar et le Premier ministre libanais figurent parmi les puissants du Moyen-Orient qui apparaissent dans ces fichiers.

Middle East Eye passe en revue les principales révélations, pays par pays. 

Liban

Alors que le Liban traverse actuellement une des pires crises économiques de son histoire et que des millions de personnes ne peuvent accéder à leurs économies ou aux services essentiels, ses élites font bon usage des paradis fiscaux à l’étranger.

Avec une fortune estimée à plus de deux milliards de dollars, le Premier ministre libanais Najib Mikati possède une société créée au Panama, et elle a été utilisée pour acheter une propriété de plus de dix millions de dollars à Monaco.

Par ailleurs, M1 Group est lié à deux sociétés basées aux îles Vierges britanniques, utilisées pour acquérir des bureaux dans le centre de Londres. 

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Le fils du Premier ministre a déclaré à l’ICIJ que les ressortissants libanais avaient recours à des sociétés au Panama et aux îles Vierges britanniques « car elles sont faciles à créer », et non à des fins d’évasion fiscale.

Le prédécesseur de Mikati, Hassan Diab, apparaît lui aussi dans les Pandora Papers comme copropriétaire d’une société-écran aux îles Vierges britanniques. 

Banquier chevronné et ancien ministre, Marwan Kheireddine a été surnommé le « chef du gang » par le site d’information alternatif Daraj lorsqu’il a été révélé qu’il possède deux sociétés aux îles Vierges britanniques, dont l’une a été utilisée pour acquérir un yacht de deux millions de dollars. 

Faisant actuellement l’objet d’une enquête pour blanchiment d’argent, le gouverneur de la Banque centrale Riad Salamé a été relié à deux autres sociétés offshores par les Pandora Papers. Salamé, qui rejette les enquêtes à son endroit au motif qu’elles auraient des « mobiles politiques », possèderait des actifs s’élevant à plusieurs centaines de millions de dollars. 

Qatar

L’émir du Qatar, le cheikh Tamim ben Hamad al-Thani, et l’ancien Premier ministre et milliardaire Hamad ben Jassim al-Thani sont derrière des comptes offshore valant plusieurs centaines de millions de dollars

Tamim ben Hamad a été relié à au moins deux sociétés enregistrées aux îles Vierges britanniques qui investissent dans des propriétés au Royaume-Uni. Utilisant ce que l’ICIJ décrit comme une « structure offshore élaborée », la mère du cheikh, Moza bent Nasser, a acquis trois propriétés en 2013. Celles-ci figuraient parmi les plus chères de Londres, équivalant à 187 millions de dollars.

Les Pandora Papers révèlent par ailleurs que Hamad ben Jassim, ancien Premier ministre de Doha, ministre des Affaires étrangères et dirigeant de la Qatar Investment Authority, a utilisé des sociétés offshores dans des paradis fiscaux tels que les îles Vierges britanniques, les Bahamas, le Panama et les îles Caïmans.

Jassim, dont la fortune nette est estimée à 1,3 milliard de dollars, s’est servi d’une chaîne complexe de filiales et de trusts pour réaliser des investissements et protéger la fortune familiale des impôts.

Émirats arabes unis

Le dirigeant de Dubaï, le cheikh Mohammed ben Rachid al-Maktoum, Premier ministre et vice-président de l’émirat depuis 2006, possède une pléthore de propriétés huppées et de luxe à travers l’Europe via des entités offshores enregistrées dans les paradis fiscaux. 

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Selon l’ICIJ, le cheikh Mohammed a secrètement enregistré trois sociétés dans les paradis fiscaux des îles Vierges britanniques et des Bahamas pour faire des affaires. 

Ces sociétés ont été enregistrées par l’entreprise émiratie Axiom Limited, détenue en partie par Dubai Holding, un conglomérat dont le cheikh Mohammed est le principal actionnaire. 

Faisal al-Bannai, homme d’affaires émirati dans le domaine de la cybertechnologie, est un actionnaire d’Axiom, ainsi que d’un certain nombre de sociétés liées aux îles Vierges britanniques. 

Maroc

Les transactions financières discutables de plusieurs célèbres personnalités ayant des liens avec le Maroc, y compris la sœur du roi Mohammed VI et le politicien français déchu Dominique Strauss-Kahn, sont documentées par les Pandora Papers. 

La princesse Lalla Hasnaa est propriétaire d’une société écran aux îles Vierges britanniques. 

La sœur du roi, qui dirige la fondation Mohammed VI pour la protection de l’environnement, aurait utilisé cette société écran pour acquérir une maison au Royaume-Uni d’une valeur estimée à onze millions de dollars à l’aide de fonds inscrits comme appartenant à la « famille royale marocaine ».

Jordanie

Entre 2003 et 2017, le roi Abdallah II s’est constitué un empire immobilier de luxe qui comprend quatorze propriétés aux États-Unis et au Royaume-Uni, de la Californie au centre de Londres. 

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Ces propriétés ont été acquises en secret, via des sociétés offshore enregistrées aux îles Vierges britanniques, pour dissimuler l’identité du roi, dévoilent les Pandora Papers. La plupart des propriétés ont été acquises après les soulèvements arabes de 2011.

Le palais royal a déclaré lundi que le roi avait « financé personnellement » ces propriétés et les dépenses afférentes, ajoutant que les allégations des Pandora Papers « contiennent des inexactitudes, déforment et exagèrent les faits ».

Deux anciens Premiers ministres jordaniens, Abdelkarim Kabariti et Nader Dahabi, sont également mentionnés dans les Pandora Papers.

Bahreïn

Zayed ben Rachid al-Zayani, ministre bahreïni de l’Industrie, du Commerce et du Tourisme, détient une participation majoritaire dans une société des îles Vierges britanniques baptisée Romanstone, via laquelle l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair et sa femme Cherie ont acheté une somptueuse maison bourgeoise dans le centre de Londres. 

Les Blair ont épargné 312 000 livres sterling de taxe foncière en acquérant la holding qui détient la propriété plutôt que d’acheter directement le bâtiment, qui vaut 6,5 millions de livres sterling.

Al-Zayani a dépensé plus de 60 millions de livres pour acheter des propriétés commerciales britanniques ces neuf dernières années, notamment la propriété acquise par le couple Blair.

Cherie Blair nie toute malversation et a déclaré au Guardian que les Zayani ne voulaient pas vendre le bâtiment indépendamment de leur société aux îles Vierges britanniques et qu’elle ignorait l’identité des vendeurs avant de valider la transaction. 

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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