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Cisjordanie : une application pour visiter virtuellement les territoires occupés

En août dernier, Israël a interdit la visite officielle de deux représentantes du Congrès américain critiques de sa politique. Des développeurs palestiniens ont alors décidé de reconstituer virtuellement le tour qu’elles auraient dû effectuer en Cisjordanie occupée
Salem Barameh, directeur de l’Institut palestinien de diplomatie publique, regarde une vidéo de Palestine VR, une nouvelle application permettant de visiter virtuellement des sites palestiniens clés avec des guides touristiques locaux, le 10 octobre 2019 à Ramallah, en Cisjordanie occupée (AFP)
Par MEE et agences à RAMALLAH, Cisjordanie occupée

La visite officielle en Cisjordanie que devaient effectuer en août dernier Ilhan Omar et Rashida Tlaib, les deux premières femmes musulmanes élues au Congrès américain, membres de l’aile gauche du Parti démocrate, était attendue avec impatience, notamment dans la famille de Rashida Tlaib, qui vit dans un village à proximité de Ramallah.

La visite était présentée comme une alternative aux voyages pro-israéliens organisés et parrainés par l’American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) à l’intention des nouveaux membres du Congrès.

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Elle n’a toutefois jamais eu lieu : Israël, qui contrôle l’accès aux territoires palestiniens occupés, a refusé de donner son aval en raison du soutien des élues américaines à la campagne de boycott d’Israël et à la suite d’un appel du président Donald Trump.

Qu’à cela ne tienne : les Palestiniens ont trouvé un moyen de leur montrer leur réalité et, par là même, d’offrir à voir au monde entier ce que les deux députées auraient dû visiter.

Gratuite, l’application VR Palestine propose des clips vidéo de 4 à 12 minutes qui montrent Jérusalem-Est, Hébron, Bethléem et d’autres endroits des territoires palestiniens occupés où Ilhan Omar et Rashida Tlaib avaient prévu de se rendre.

« Nous voulions faire le tour qu’elles étaient prêtes à faire et le rendre plus accessible », a expliqué à l’AFP Salem Barameh, directeur exécutif du Palestine Institute for Public Diplomacy, qui a pensé l’application.

« Généralement, les gens qui ont le privilège de venir et de voir la réalité en Palestine finissent par changer d’avis sur cet endroit. Mais beaucoup n’ont pas la possibilité de venir, alors nous voulions leur montrer », ajoute-t-il.

« Voir la réalité »

Les élues américaines ont été interdites d’entrée car elles voulaient « constater l’impact des politiques américaines et spécifiquement du soutien [des États-Unis] aux politiques israéliennes injustes », note Diana Buttu, une avocate palestinienne et ancienne conseillère de l’Autorité palestinienne qui avait participé à la préparation de leur visite.

« C’est une jolie façon, pas juste pour Mmes Tlaib et Omar, de vivre le tour qu’elles auraient dû suivre, mais aussi pour les autres membres du Congrès de voir la réalité, la Palestine et ce que nous y vivons », explique Salem Barameh.

Israël a justifié sa décision en août par l’existence d’une loi israélienne permettant depuis 2017 d’interdire l’entrée aux partisans du mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) qui appelle au boycott économique, culturel et scientifique d’Israël afin de protester contre l’occupation et la politique israélienne vis-à-vis des Palestiniens.

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La colonisation par Israël de la Cisjordanie occupée et de Jérusalem-Est annexée s’est poursuivie sous tous les gouvernements israéliens depuis 1967, mais elle s’est accélérée ces dernières années sous l’impulsion du Premier ministre Benyamin Netanyahou et avec la bienveillance de son allié à Washington, Donald Trump.

En septembre, dans le cadre de la campagne pour les législatives en Israël, Netanyahou a promis d’annexer la vallée du Jourdain, en Cisjordanie, s’il était réélu.

Ilhan Omar et Rashida Tlaib ne sont pas les seules à n’avoir pu se rendre dans les territoires palestiniens. De nombreuses personnes suspectées de sympathie envers la cause palestinienne se voient régulièrement refuser l’accès par Israël, y compris des époux et épouses étrangers de Palestiniens.

Mais comme l’illustre l’application VR Palestine, les Palestiniens ont de la ressource quand il s’agit de contourner les effets de l’occupation. Il existe par exemple plusieurs applications permettant d’éviter les check-points en Cisjordanie, tandis qu’à Gaza, une application permettant de faciliter le don de sang aide à pallier les difficultés causées dans le secteur de la santé par le siège israélien.

Reportage réalisé par l’Agence France Presse à Ramallah.

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