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« Un devoir » : les scouts palestiniens évoquent leur rôle de protection de la mosquée al-Aqsa

Zoom sur le rôle joué par les scouts palestiniens dans le troisième lieu saint de l’islam et l’impact de l’occupation israélienne sur leurs activités
Des scouts palestiniens et des membres du Croissant-Rouge palestinien forment une chaîne pour protéger les fidèles lors des prières à la mosquée al-Aqsa à Jérusalem (MEE)
Par MEE à JÉRUSALEM-EST OCCUPÉE

Les Palestiniens qui ont la chance d’assister aux prières du vendredi à la mosquée al-Aqsa lors du Ramadan remarqueront un phénomène curieux : des centaines de scouts qui se distinguent par leur veste d’uniforme noir et leur foulard autour du cou slaloment à travers la foule. 

Chargés d’aider les fidèles, ces jeunes palestiniens aiguillent les personnes perdues, aident à retrouver des objets égarés et régulent la foule aux entrées étroites du lieu saint.

Ce sont également les yeux et les oreilles sur le terrain de l’administrateur du complexe de 14 hectares, le Waqf islamique, qu’ils préviennent des problèmes éventuels.

« Les entrées d’al-Aqsa sont relativement étroites et ne peuvent permettre à des milliers de personnes de passer en même temps. Il faut donc réguler la foule à ce niveau afin d’éviter les bousculades », explique Ayman Mathar, chef du comité de formation des scouts palestiniens.  

La mosquée al-Aqsa, un des sites les plus saints de l’islam
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Dans ces cas-là, ce sont les scouts, en collaboration étroite avec le Croissant-Rouge palestinien, qui ouvrent la voie aux ambulances et aux équipes médicales pour qu’elles puissent faire leur travail.

« Notre objectif est de permettre aux gens de pouvoir prier en paix, en particulier les touristes et les gens de Cisjordanie, car c’est leur première visite à Jérusalem », explique à Middle East Eye Mohammed Jamil Sawalmeh, vice-président des scouts palestiniens.

Les scouts de Sawalmeh sont essentiels au bon fonctionnement de la mosquée al-Aqsa, non seulement pour s’assurer de réduire les risques d’accident parmi les fidèles (qui peuvent atteindre les 100 000 personnes) mais aussi mettre les gens en sécurité en cas d’attaque des forces israéliennes.

Stationnés dans une petite base près de la mosquée al-Qibli, environ 800 scouts sont présents dans le lieu saint, et se dispersent sur la zone après avoir reçu leurs ordres.

« Un endroit vraiment spécial »

Composés de chrétiens et de musulmans, les scouts sont généralement impliqués dans la coordination des événements religieux de leurs communautés respectives.

En plus d’aider lors du Ramadan et des fêtes islamiques, les scouts aident également lors des parades de Pâques et les célébrations de Noël. 

En plus de leur travail à la mosquée al-Aqsa, les scouts sont impliqués dans des activités typiques, les mêmes que leurs camarades à l’étranger : ils participent à diverses initiatives sociales et humanitaires, notamment les collectes de sang et les distributions de nourriture. 

Lors des soirées du Ramadan, les scouts patrouillent dans le quartier d’al-Aqsa, donnant des dates et de l’eau aux familles qui vont rompre leur jeune. Ils fournissent également des repas chauds aux moins chanceux.

En dehors de Jérusalem, on retrouve les mêmes initiatives dans les communautés locales. 

Une scout porte le foulard palestinien à la mosquée al-Aqsa de Jérusalem (MEE)
Une scout porte le foulard palestinien à la mosquée al-Aqsa de Jérusalem (MEE)

Mawadda, scout âgée de 18 ans, dit participer à l’organisation depuis trois ans et demi environ. « J’ai beaucoup appris et j’ai pu aider de nombreuses personnes », confie-t-elle. 

De nombreux scouts considèrent comme leur devoir, en tant que Palestiniens, d’assurer la sécurité et la sainteté d’al-Aqsa.

« On se rassemble le matin et on discute de l’endroit où on sera stationné et on désigne notre responsable », indique Mohammed Abu Sneineh, qui gère les relations publiques pour les scouts. 

« Nous avons des gens partout des escaliers aux portes, autour du dôme du Rocher, à côté de la mosquée al-Qibli, et cela nous aide à empêcher que les forces d’occupation fassent irruption à al-Aqsa », ajoute-t-il.

Selon Abu Sneineh, le principal objectif des scouts est d’aider les jeunes à développer des aptitudes personnelles qui leur permettront de devenir de bons citoyens qui aideront les autres dans leur communauté. 

Les scouts au dôme du Rocher lors du Ramadan en mars 2023 (MEE)
Les scouts au dôme du Rocher lors du Ramadan en mars 2023 (MEE)

Al-Aqsa est le troisième lieu saint de l’islam et attire des visiteurs musulmans du monde entier et c’est l’un des symboles les plus reconnaissables du peuple palestinien. Pour les scouts, pouvoir rendre service aux fidèles sur le site est en un sens un devoir civique et religieux.

« Al-Aqsa est un endroit vraiment spécial pour nous tous. Qu’importe le nombre de fois où je viens, c’est toujours comme si je la voyais pour la première fois », commente Areej Ayoub Farah, chef scout. 

« Les gens viennent ici pour oublier leurs inquiétudes, baigner dans une énergie positive et se reconnecter à leur spiritualité. C’est pourquoi nous voulons maintenir la paix ici et protéger les lieux », ajoute-t-elle. 

Occupation israélienne 

Les scouts sont présents à la mosquée al-Aqsa depuis des décennies et, comme la plupart des aspects de la vie palestinienne, gérer l’impact de l’occupation israélienne est un aspect majeur de leur travail.

« Nous devons nous préparer pour le Ramadan pendant plus de quatre mois afin de fournir aux gens qui viennent d’autres villes les autorisations nécessaires, lesquelles sont émises par l’occupation israélienne », indique Sawalmeh. 

« Plus de 70 scouts venant de Hébron qui devaient nous aider pendant le Ramadan ont été refoulés », ajoute-t-il.

« Même si on a les autorisations, les forces d’occupation nous compliquent la vie, qu’on soit Palestinien chrétien ou musulman »

- Mohammed Sawalmeh, vice-président des scouts palestiniens

Abu Sneineh raconte qu’au fil des ans, les forces israéliennes ont lourdement entravé leurs efforts.

« Il nous faut la permission de l’occupation israélienne pour tout, des talkies-walkies aux uniformes. Ils ne nous laissent même pas notre bague à foulard parce qu’il y a le drapeau palestinien dessus », déplore-t-il. 

« Même si on a les autorisations, les forces d’occupation nous compliquent la vie, qu’on soit Palestinien chrétien ou musulman », ajoute Sawalmeh.

En raison des restrictions israéliennes relatives à la circulation des Palestiniens, il est également difficile pour les scouts venant de différentes régions de Palestine de pouvoir se rencontrer et s’entraîner ensemble.

« La seule fois où les scouts se voient vraiment quand ils viennent de villes différentes, c’est lorsque nous allons à l’étranger », poursuit Sawalmeh. Il note que les scouts de Gaza sont particulièrement isolés des autres villes en raison du blocus israélien sur ce territoire. 

VIDÉO : La lutte pour la mosquée al-Aqsa
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Malgré les obstacles, les scouts restent déterminés et, conformément à leur formation, cherchent des solutions aux défis qu’ils rencontrent.

« Nous avons une longue histoire et les scouts palestiniens sont liés au mouvement de libération de la Palestine. Cela prend la forme d’une résistance pacifique et civique », précise Sawalmeh.  

« On a aidé les gens tout au long de l’histoire et dans les périodes difficiles, comme la Nakba [catastrophe] de 1948 et la guerre des Six Jours en 1967, et c’est pourquoi les scouts palestiniens ne mourront jamais. »

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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