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Un rapport annonce un stress hydrique extrême d’ici à 2050 pour tout le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord

Selon le rapport, la stabilité alimentaire mondiale est menacée. Actuellement, 60 % des cultures irriguées dans le monde subissent de graves contraintes hydriques, en particulier les cultures de base comme la canne à sucre, le blé, le riz et le maïs
Un troupeau de moutons marche sur le sol fissuré près du barrage Al Massira au sud de Casablanca, le 8 août 2022 (AFP/Fadel Senna)
Un troupeau de moutons marche sur le sol fissuré près du barrage Al Massira au sud de Casablanca, le 8 août 2022 (AFP/Fadel Senna)
Par MEE

Le monde est confronté à une crise de l’eau sans précédent. Au top 5 des pays les plus touchés par le stress hydrique : Bahreïn, Chypre, le Koweït, le Liban, Oman et le Qatar, selon un nouveau rapport du World Resources Institute, think tank spécialisé sur les questions environnementales et basé à Washington, publié le 16 août.

Les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite, Israël, l’Égypte, le Yémen, l’Iran, la Jordanie, la Tunisie, l’Irak, l’Inde, la Syrie, le Maroc, l’Érythrée et l’Algérie figurent aussi parmi les 30 premiers pays à fort stress hydrique.

« Nos données montrent que, chaque année, 25 pays sont actuellement exposés à un stress hydrique extrêmement élevé, ce qui signifie qu’ils utilisent plus de 80 % de leur approvisionnement en eau renouvelable pour l’irrigation, le bétail, l’industrie et les besoins domestiques », indique le rapport.

« Même une sécheresse de courte durée met ces [pays] en danger de manquer d’eau et incite parfois les gouvernements à fermer les robinets. »

La Turquie se classe 39e pour le stress hydrique le plus élevé au monde, toujours selon le rapport.

Mercredi 16 août, les habitants d’Istanbul ont été invités à réduire leur consommation d’eau, alors que les grandes villes du pays traversent avec une crise mêlant sécheresse et températures élevées.

Le maire d’Istanbul, Ekrem İmamoğlu, a exhorté les 16 millions d’habitants de la ville à conserver « chaque précieuse goutte d’eau qui coule du robinet ».

Son appel est intervenu quelques jours après la publication par l’Administration des eaux et des égouts d’Istanbul (ISKI) de données montrant que les barrages de la ville n’étaient remplis qu’à environ 33 % à la mi-août, le taux le plus bas depuis neuf ans.

Le directeur général d’ISKI, Safak Basa, a lancé la semaine dernière une campagne d’économie d’eau pour compenser la « sécheresse catastrophique ».

Protestations en Iran

Selon l’Aqueduct Water Risk Atlas du World Resources Institute, d’ici à 2050, 1 milliard de personnes supplémentaires devraient vivre avec un stress hydrique extrêmement élevé.

Le rapport prévoit que la demande mondiale en eau augmentera de 20 à 25 % d’ici à 2050, tandis que le nombre de bassins versants confrontés à une forte variabilité d’une année à l’autre, ou à des approvisionnements en eau moins prévisibles, devrait augmenter de 19 %.

Cela signifie qu’au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, 100 % de la population vivra avec un stress hydrique extrêmement élevé d’ici à 2050.

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« C’est un problème non seulement pour les consommateurs et les industries dépendantes de l’eau, mais pour la stabilité politique. En Iran, par exemple, des décennies de mauvaise gestion de l’eau et d’utilisation non durable de l’eau pour l’agriculture provoquent déjà des protestations – des tensions qui ne feront que s’intensifier à mesure que le stress hydrique s’aggrave », indique le rapport.

Le rapport note que la pénurie d’eau dans ces pays est principalement attribuée à un approvisionnement limité, associé aux besoins des secteurs domestique, agricole et industriel.

La pénurie d’eau peut entraîner des perturbations dans les industries, des pannes d’électricité et une baisse du rendement agricole, note le rapport.

Cela a été évident en Inde, où de 2017 à 2021, le manque d’eau pour le refroidissement des centrales thermiques a entraîné une perte d’énergie de 8,2 térawattheures. Cette quantité d’énergie aurait pu alimenter 1,5 million de foyers indiens pendant une demi-décennie.

Selon le rapport, la stabilité alimentaire mondiale est menacée. Actuellement, 60 % des cultures irriguées dans le monde subissent de graves contraintes hydriques, en particulier les cultures de base comme la canne à sucre, le blé, le riz et le maïs.

Nourrir 10 milliards d’individus

Mais pour nourrir les 10 milliards d’individus annoncés pour 2050, le monde devra générer 56 % de calories alimentaires de plus qu’en 2010, un obstacle intensifié par les contraintes croissantes en eau et les catastrophes induites par le climat comme les sécheresses et les inondations.

Au Maroc, où le mois de juillet s’est classé au quatrième rang parmi les mois de juillet les plus chauds depuis 1961, le ministre de l’Agriculture Mohamed Sadiki a annoncé en mai que des mesures avaient été prises pour assurer la « stabilité des prix » des produits agricoles, qui, avec la sécheresse devenue chronique, sont devenus plus chers que jamais, contribuant à une hausse sans précédent de l’inflation.

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Pour améliorer la gestion de l’eau et réduire le stress hydrique, le World Resources Institute affirme que les pays peuvent améliorer leurs politiques de gestion de l’eau, promouvoir la conservation de l’eau dans l’agriculture, mettre en œuvre des stratégies globales de ressources en eau et renforcer les infrastructures hydrauliques en utilisant des méthodes respectueuses de l’environnement et des infrastructures vertes.

Les institutions financières internationales et les autres créanciers devraient envisager de lancer des initiatives stratégiques d’allégement de la dette, telles que des échanges dette-nature, ou l’annulation de la dette en échange d’un engagement à financer la biodiversité ou des infrastructures solides, indique le rapport.

De plus, les sources d’énergie économes en eau doivent être prioritaires et les villes doivent élaborer des plans d’action pour la résilience de l’eau en milieu urbain. Les agriculteurs devraient passer à des cultures économes en eau ou utiliser des méthodes telles que l’irrigation par aspersion ou goutte à goutte plutôt que la submersion des champs.

Traduit de l’anglais (original).

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