Aller au contenu principal

Bachar al-Assad : « Tout terroriste qui se trouve dans les régions contrôlées par les forces syriennes sera soumis à la loi syrienne »

Dans une interview à un hebdomadaire français, le président syrien insiste sur le fait que les membres d’organisations extrémistes armées détenus dans le Nord syrien seront jugés en Syrie 
Bachar al-Assad lors de son interview avec le magazine Paris-Match (SANA/AFP)
Par MEE

Les individus appartenant à des groupes extrémistes armés actuellement présents dans le nord de la Syrie seront jugés par la justice syrienne quelle que soit leur nationalité, déclare le président Bachar al-Assad dans une interview au magazine français Paris Match publiée ce jeudi 28 novembre. 

« Un terroriste, c’est un terroriste. Qu’il soit français ou syrien, le résultat est le même […] Tout terroriste qui se trouve dans les régions contrôlées par les forces syriennes sera soumis à la loi syrienne. La loi syrienne est très claire vis-à-vis du terrorisme. Ils seront donc traduits en justice, et nous avons des tribunaux spécialisés en matière de terrorisme », précise le président syrien. 

« Un terroriste, c’est un terroriste. Qu’il soit français ou syrien, le résultat est le même » 

- Bachar al-Assad, président syrien

Les Forces démocratiques syriennes (FDS) dirigées par les Kurdes, qui ont vaincu l’État islamique (EI) en mars dernier avec l’aide de la coalition dirigée par les États-Unis, détiennent plus de 10 000 membres du groupe, principalement des Syriens et des Irakiens, dont environ 2 000 étrangers. 

Abandonnés par leurs alliés américains, les Kurdes se sont tournés vers Assad et la Russie pour se protéger. Au cours des dernières semaines, les forces syriennes et russes se sont dès lors installées dans des zones autrefois tenues par les Kurdes.

Les autorités syriennes détiennent des centaines de membres de l’EI capturés lors de batailles entre le groupe et les forces gouvernementales au cours des dernières années dans différentes régions du pays. Aucune annonce publique n’a été faite quant à leur jugement, contrairement à l’Irak voisin, où des milliers de membres de l’EI, dont beaucoup d’étrangers, ont été condamnés à mort.

Certaines organisations de défense des droits de l’homme se sont inquiétées de la prise en charge par les troupes gouvernementales syriennes des centres de détention actuellement gérés par les Kurdes, alliés des États-Unis.

 « Un acte immoral » 

Réagissant à la question du journaliste français sur l’attitude du président turc, Recep Tayyip Erdoğan, qui envisage de « renvoyer » ces prisonniers en Europe, Assad répond : « Erdoğan tente de faire chanter l’Europe. Quelqu’un qui se respecte ne parle pas de cette manière. Il y a des institutions et des lois. Renvoyer vers un autre pays les terroristes ou toute personne qui a été jugée et condamnée est soumis à des accords bilatéraux entre les États. Quant au fait de sortir de prison quelqu’un que vous savez être un terroriste, et le renvoyer chez lui pour qu’il tue des civils, c’est un acte immoral. »  

Début novembre, le ministre turc de l’Intérieur Süleyman Soylu a annoncé que la Turquie allait renvoyer dans leur pays d’origine les membres étrangers de l’EI actuellement détenus sur son sol. « Pas besoin de courir dans tous les sens : nous allons vous renvoyer les membres de l’EI. Ils sont à vous, faites-en ce que vous voudrez. » 

La plupart des pays européens refusent de récupérer leurs ressortissants et un certain nombre de prisonniers français ont été condamnés à mort lors de procès en Irak.

« C’est une de ses plaisanteries. C’est une blague… »

Le chef de l’EI, Abou Bakr al-Baghdadi, a été éliminé par les forces spéciales américaines le 27 octobre dernier dans le nord-ouest de la Syrie. En annonçant la nouvelle, le président Donald Trump avait remercié plusieurs pays pour leur aide dans cette opération, citant la Russie, l’Irak, la Turquie mais aussi la Syrie. 

« Après ils peuvent me pendre » : dans la prison des combattants de l’EI au nord de la Syrie
Lire

Le journaliste de Paris-Match pose donc la question à Assad : « Est-ce que vous avez donné une information aux Américains ? Est-ce que vous saviez où il était ? »

« Cela me fait toujours rire quand on me pose cette question », répond le président syrien. « Le plus important est de savoir si vraiment Abou Bakr al-Baghdadi a été tué ou non, et si cette belle comédie présentée par les Américains a vraiment eu lieu. » 

Et d’ajouter : « Daech a été fabriqué par les Américains. Il fait partie de cette comédie. Baghdadi a appris à jouer son rôle lorsqu’il était dans les prisons américaines en Irak. C’est pourquoi je dis que c’est une grande comédie. Est-ce que ça a vraiment eu lieu ? Je ne sais pas. Ça ne veut pas dire qu’il n’a pas été tué, mais s’il l’a été, ce n’est pas parce qu’il était un terroriste. » 

Assad finit par démentir toute aide apportée aux Américains dans leur traque d’al-Baghdadi : « Ils étaient capables de frapper Daech lorsqu’il volait le pétrole syrien vers l’Irak, mais ils ne l’ont pas fait. Et lorsque Daech a attaqué l’armée syrienne à Deir ez-Zzor, les Américains ont frappé l’armée syrienne et non Daech. Par conséquent, nous n’avons pas collaboré avec les Américains en quoi que ce soit. Nous ne pouvons pas collaborer dans la lutte contre le terrorisme avec ceux qui soutiennent le terrorisme. » 

Alors pourquoi Trump cite-t-il la Syrie comme partenaire de cette opération ? « C’est une de ses plaisanteries. C’est une blague… », se contente de répondre le président syrien. 

Middle East Eye propose une couverture et une analyse indépendantes et incomparables du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et d’autres régions du monde. Pour en savoir plus sur la reprise de ce contenu et les frais qui s’appliquent, veuillez remplir ce formulaire [en anglais]. Pour en savoir plus sur MEE, cliquez ici [en anglais].