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Rishi Sunak : le nouveau Premier ministre britannique et le Moyen-Orient

L’ancien chancelier de l’Échiquier estime qu’il existe « de très bons arguments » en faveur d’un transfert à Jérusalem de l’ambassade britannique en Israël et que ceux qui « calomnient la Grande-Bretagne » doivent être considérés comme des extrémistes
Rishi Sunak au siège du Parti conservateur, dans le centre de Londres, après l’annonce de son accession à la direction du parti, le 24 octobre 2022 (AFP)

L’ancien chancelier de l’Échiquier britannique Rishi Sunak est devenu lundi le premier Premier ministre du Royaume-Uni non blanc. 

Rishi Sunak avait le soutien d’environ 200 députés conservateurs dans la course éclair à la direction du parti, déclenchée la semaine dernière par la démission de Liz Truss

Sa seule rivale, la cheffe de la Chambre des Communes Penny Mordaunt (42 ans), a jeté l’éponge, faute d’avoir reçu un soutien suffisant auprès des députés. 

En tant que chancelier de l’Échiquier entre 2020 et 2022, Rishi Sunak a été chargé des mesures fiscales prises par le gouvernement britannique pour faire face aux retombées économiques de la pandémie de covid-19, notamment le plan de chômage partiel et l’initiative « Eat Out to Help Out » visant à stimuler les entreprises locales. 

Comme l’ancien Premier ministre Boris Johnson, il a écopé d’une amende pour avoir participé à une fête d’anniversaire au 10 Downing Street en plein confinement. 

Début juillet, sa démission du gouvernement ainsi que celle du secrétaire d’État à la Santé Sajid Javid ont déclenché une vague de démissions qui a précipité la chute du gouvernement de Boris Johnson. 

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Rishi Sunak était l’un des principaux candidats à la direction du parti, mais il s’est incliné face à Liz Truss. Cependant, après avoir mis fin la semaine dernière au mandat de Premier ministre britannique le plus court de l’histoire, cette dernière offre désormais à son ancien concurrent l’occasion de diriger le pays. 

Contrairement à Liz Truss, le nouveau Premier ministre n’a jamais été secrétaire d’État aux Affaires étrangères ni occupé de fonctions gouvernementales liées au rôle de la Grande-Bretagne à l’étranger, y compris au Moyen-Orient. 

Ces derniers mois, Rishi Sunak s’est amplement exprimé en faveur d’Israël, envisageant notamment de transférer à Jérusalem l’ambassade du Royaume-Uni dans le pays, ainsi que sur l’accord sur le nucléaire avec l’Iran et la menace de l’« extrémisme islamiste ». 

« De très bons arguments » en faveur d’un transfert de l’ambassade en Israël

Lors d’un événement organisé en août par les Conservative Friends of Israel, Rishi Sunak a déclaré qu’il existait « de très bons arguments » justifiant le possible transfert de l’ambassade du Royaume-Uni de Tel Aviv à Jérusalem et la reconnaissance de cette dernière en tant que capitale d’Israël. 

Le Royaume-Uni maintient depuis longtemps sa mission diplomatique à Tel Aviv, même depuis qu’Israël a désigné Jérusalem comme sa capitale, dans le cadre d’une politique de longue date selon laquelle le statut final de la ville doit être décidé à l’issue de négociations entre Palestiniens et Israéliens.

Or le mois dernier, Liz Truss a annoncé une révision de la situation, suscitant l’indignation de dirigeants chrétiens et musulmans ainsi que de partis d’opposition britanniques

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Rishi Sunak s’est opposé à la désignation d’Israël en tant qu’État d’apartheid, une initiative que des organisations de défense des droits de l’homme de premier plan dont Amnesty International, Human Rights Watch et l’ONG israélienne B’Tselem ont entreprise au cours des derniers mois. 

« L’allégation d’apartheid est non seulement incorrecte sur le plan des faits, mais aussi ouvertement offensante », a-t-il déclaré au Jewish Chronicle.

« Comme toute nation, Israël n’est pas parfait, mais c’est une démocratie multiethnique dynamique avec une presse libre et régie par l’État de droit. Il représente une lueur d’espoir dans une région d’autocraties et d’extrémistes religieux. »

Dans la même interview, Rishi Sunak a fait l’éloge des accords de normalisation négociés par les États-Unis entre Israël et plusieurs pays arabes. 

« Le Royaume-Uni est en bonne position pour tirer parti de ses relations historiques avec d’autres États du Golfe afin d’élargir les accords et j’aimerais voir les diplomates britanniques mettre davantage l’accent sur ce point. »

L’ancien chancelier de l’Échiquier s’est également engagé à faire adopter un projet de loi visant à réprimer le mouvement pro-palestinien Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS). 

En 2018, en tant que sous-secrétaire d’État en charge des collectivités locales, il a émis une directive contre l’utilisation par des employés du secteur public de leur pension en faveur d’un boycott d’Israël, invitant les autorités à ne pas poursuivre « des politiques d’investissement contraires à la politique étrangère ou à la politique en matière de défense du Royaume-Uni ».

En mars, il a rencontré le ministre israélien des Finances Avigdor Liberman pour discuter d’un futur accord de libre-échange entre le Royaume-Uni et Israël. 

L’accord avec l’Iran et la stratégie Prevent

En début d’année, l’ancien Premier ministre Boris Johnson a été critiqué pour s’être rendu en Arabie saoudite afin de rencontrer le prince héritier Mohammed ben Salmane dans le but d’obtenir une hausse de la production de pétrole, en dépit du bilan du royaume en matière de droits de l’homme. 

« Personne ne ferme les yeux sur les violations des droits de l’homme. Je suppose que vous faites référence au voyage du Premier ministre au Moyen-Orient ? », a déclaré Rishi Sunak dans une matinale de la BBC en mars. 

« Il a soulevé la question des violations des droits de l’homme lorsqu’il était là-bas, mais il a également eu un dialogue très constructif sur le travail que nous pouvons mener avec nos alliés dans le monde entier pour apporter une meilleure sécurité énergétique ici, chez nous, et c’est bien qu’il le fasse. »

Au cours de la même émission, Rishi Sunak a également été interrogé sur des propos formulés par le passé, lorsqu’il s’était dit « ravi » de voir la société émiratie DP World, propriétaire de la société de transport P&O Ferries, à la tête de plusieurs ports francs au Royaume-Uni. 

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La multinationale émiratie a ensuite licencié 800 employés de la société de ferries, suscitant l’indignation au Royaume-Uni. 

« Ce qui s’est passé est épouvantable… On ne doit pas traiter les gens de cette manière », a déclaré Rishi Sunak à propos de la vague de licenciements.

En ce qui concerne l’Iran, l’ancien secrétaire d’État à la Défense Liam Fox, allié de Rishi Sunak, affirme que le nouveau Premier ministre est « plus belliqueux » que le Foreign Office sous Boris Johnson. 

« Il voudrait que des sanctions maximales soient imposées pour voir si l’Iran peut être persuadé ou forcé de conclure un accord plus large, allant au-delà du seul programme nucléaire », a souligné Liam Fox.

« Il estime que le plan d’action conjoint n’arrête pas réellement le programme nucléaire iranien, qu’il ne fait que le retarder en le rendant un peu plus difficile. »

Rishi Sunak a en outre décrit l’extrémisme islamiste comme « la plus grande menace pour la sécurité nationale du Royaume-Uni », ajoutant que la stratégie Prevent du gouvernement ne parvenait pas à y faire face.

Il a annoncé son intention de considérer ceux qui « calomnient la Grande-Bretagne » comme des extrémistes devant être orientés vers ce programme controversé de lutte contre le terrorisme. 

En juillet, il a également déclaré qu’il ferait « tout ce qu’il faudr[ait] » pour que le plan très critiqué du gouvernement britannique visant à expulser des demandeurs d’asile vers le Rwanda « soit mis en œuvre à grande échelle ». 

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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