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Au moins vingt princes arrêtés lors d’une purge massive organisée par MBS

Le frère du roi, le prince Ahmed ben Abdelaziz, et son fils ont été arrêtés lors du dernier coup de force du prince héritier Mohammed ben Salmane
Le prince Ahmed ben Abdelaziz, à droite, a été arrêté sur ordre de son frère, le roi Salmane, et de son neveu, le prince héritier Mohammed, à gauche

Une purge ciblant des princes de la cour royale est en cours en Arabie saoudite, après l’arrestation du dissident le plus haut gradé de la dynastie saoudienne, le prince Ahmed ben Abdelaziz, le frère du roi Salmane, présumé coupable d’avoir comploté un coup d’État contre le fils du roi, le prince héritier Mohammed ben Salmane.

Selon Middle East Eye, pas moins de vingt princes ont été arrêtés pour avoir prétendument participé à un coup d’État visant à renverser le prince héritier, également connu sous le nom de MBS.

Jusqu’à présent, quatre noms sont connus de MEE. Il s’agit du prince Ahmed ; de son fils, le prince Nayef ben Ahmed ben Abdelaziz ; du chef des services de renseignement et de sécurité des forces terrestres, l’ancien prince héritier Mohammed ben Nayef ; et de son demi-frère Nawaf.

Le fils d’Ahmed est le membre le plus haut gradé des forces armées saoudiennes connu pour avoir été arrêté jusqu’à présent, ont confirmé des sources MEE.

Quelques instants après les arrestations, MBS a ordonné aux princes du royaume de lui tweeter leur loyauté. Trois d’entre eux l’ont déjà fait.

Traduction : Abdellah ben Soltane al-Saoud tweete « Qui est en paix avec eux l’est avec nous, qui est hostile envers eux l’est avec nous. Nous avons prêté allégeance et nous nous y sommes engagés devant Dieu. Nous sommes tous Mohammed. » 

Selon une source de la région citée par Reuters, MBS « les a accusés [les princes] d’avoir établi des contacts avec des puissances étrangères, y compris les Américains, pour mener un coup d’État ».

Reuters a cité des sources affirmant que le roi Salmane lui-même avait signé les mandats d’arrêt. Elles ont affirmé que son état mental était bon. Le roi est connu pour souffrir de démence.

Vendredi, le sort du prince Miteb ben Abdallah était une source de préoccupation. Considéré à un moment comme l’un des principaux prétendants au trône, il avait été libéré du Ritz Carlton en 2017 – où il était détenu et avait été torturé – après avoir payé plus d’un milliard de dollars dans un accord avec les autorités.

Miteb, 65 ans, est le fils du défunt roi Abdallah et ancien chef de la Garde nationale.

Acte désespéré

La purge en cours est l’acte le plus audacieux et le plus désespéré de son neveu MBS dans sa quête du pouvoir absolu.

Son impact sur la stabilité du royaume est plus important que la purge des quelque 500 membres de l’élite économique du pays emprisonnés au Ritz Carlton pour des accusations de corruption présumées, le 4 novembre 2017, et le meurtre, ordonné par l’État, du journaliste Jamal Khashoggi à Istanbul l’année suivante. 

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Les services de renseignement américains et britanniques avaient demandé et obtenu auprès de MBS des garanties selon lesquelles le prince Ahmed ne serait pas arrêté à son retour de Londres en octobre 2018.

Ben Nayef était lui-même un membre de confiance de l’alliance antiterroriste dirigée par la CIA et le Pentagone.

Depuis sa destitution en tant que prince héritier, le prince Nayef a été dépouillé de ses collaborateurs, de ses téléphones portables et de ses indemnités et n’est pas autorisé à voyager. Vendredi, avec son demi-frère, ils ont été arrêtés alors qu’ils étaient dans un campement privé dans le désert.

Selon nos sources, Nayef s’était plaint amèrement à des amis et dans des lettres au roi lui-même du retrait de ses indemnités royales.

Son nom et celui du prince Ahmed étaient régulièrement mentionnés par d’autres sources importantes de la famille royale comme remplaçants potentiels du prince héritier, signe de mécontentement face à son règne absolutiste.

L’opposition à MBS n’est pas un secret

Le prince Ahmed, dissident royal le plus haut gradé du royaume, était franc dans sa critique envers MBS.

Lorsqu’il a quitté son domicile, à Londres, pour retourner en Arabie saoudite en octobre 2018, il avait calculé que son rang de frère cadet du roi, et surtout de cadet des sept frères Sudairi, lui permettait de bénéficier de l’immunité contre les actes de son neveu.

Comme je l’ai révélé à l’époque, le prince Ahmed avait des doutes considérables sur la sagesse de son retour et avait envisagé de vivre pour toujours en exil.

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Ahmed s’est laissé persuader de rentrer par les appels des autres princes, montrant la haute estime dont il était toujours l’objet dans le royaume, et par le fait qu’il exerçait toujours une influence officielle en tant que membre du Conseil d’allégeance, l’organe qui doit sumboliquement approuver l’accession de MBS au trône.

Ahmed ne cachait pas son opposition à la nomination de MBS en tant que prince héritier ou à la campagne au Yémen que le prince héritier, en tant que ministre de la Défense, a lancée en 2015, avant de partir lui-même en vacances aux Maldives.

Interpellé par une manifestation de Yéménites et Bahreïnites scandant « À bas, À bas al-Saoud. Famille criminelle » devant son domicile à Londres, un mois avant son départ, Ahmed s’était approché d’eux et leur avait demandé : « Pourquoi dites-vous cela sur les al-Saoud ? Qu’est-ce que toute la famille al-Saoud a à voir avec cela ? Il y a certaines personnes qui sont responsables. N’impliquez pas tout le monde. »

Interrogé par les manifestants sur ces responsables, le prince a répondu : « Le roi et le prince héritier, et d’autres au sein de l’État ».

Point d’interrogation

À son retour, Ahmed a été traité avec un respect officiel, il a conservé ses indemnités et ses collaborateurs en tant que prince aîné, et, jusqu’à présent, était autorisé à voyager.

Un grand point d’interrogation plane désormais sur l’actuel ministre de l’Intérieur, Abdelaziz ben Saoud ben Nayef, maintenant que ses deux oncles sont arrêtés pour trahison.

La purge actuelle survient dans une conjoncture critique pour MBS

Le père d’Abdelaziz, Saoud, est le frère aîné de ben Nayef et est actuellement gouverneur de la province de l’Est.

La purge actuelle survient dans une conjoncture critique pour MBS.

Contrairement à novembre 2017 – lorsque le prince héritier a lancé sa première purge contre l’élite économique alors qu’il était à l’apogée de sa popularité, connu à la fois à l’intérieur et en dehors du royaume comme réformateur –, MBS est plus que jamais détesté dans sa famille.

Plus de dix-huit mois plus tard, les réformes du prince héritier sont dans l’impasse, le prix du pétrole brut a chuté après que la Russie a refusé la semaine dernière de réduire sa production, et le mécontentement monte dans le royaume au sujet de la décision du prince héritier de fermer les lieux saints de La Mecque et de Médine à tous les pèlerins de la oumra, quelques mois seulement avant le début du hadj – à cause de l’épidémie de coronavirus.

Traduit de l’anglais (original).

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